Les Chemins de Khatovar

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  • Le Regard des furies / Javier Negrete

    Posted By on 28 juin 2013

    Titre original : La mirada de las furias, 1997
    L’Atalante, 416 pages

    Javier Negrete avait commencé sa brillante carrière multi-genre par la SF.
    Ici c’est à la fois un bon roman de SF et un bon thriller sinon un bon roman d’espionnage, mais pas que.

    L’auteur nous présente une Terre cyberpunk qui a essaimé dans la galaxie, sous l’étroit contrôle des Tritons, peuple aquatique seul maître des voyages supraluminiques tout droit sorti de la saga culte Dune. Mais le roman se déroule sur la planète carcéral de Rhadamante, dont toute la toponymie se calque sur la géographie des enfers gréco-romains (ce qui nous amène à une réflexion intéressante car on peine à différencier cette société calquée sur les anciens bagnes australiens de notre société moderne).

    Le facteur temps est très bien géré : une fois le roman démarré, on ne s’ennuie jamais !
    C’est avec plaisir que nous suivons les investigations de cet androïde espion qui suit les traces de 007. C’est d’autant plus agréable que cela s’inspire du cahier des charges des films d’espionnages grands publics. Mais difficile de savoir si le détenteur du permis de tuer féru de culture antique est Sean Connery ou son antithèse…

    Le roman présente une dimension psychologique et philosophique agréable, car notre androïde rêve de Furies électriques et commence à douter malgré ses améliorations cérébrales et ses inhibiteurs de sentiments. Trois personnages féminins bien campés catalysent sa crise existentielle : la douce Clara, la forte Uranie, l’impitoyable Amara sont les avatars de Mégère, Alecto et Tisiphone qui vont précipiter les événements.
    Comme dans les tragédies antiques, le héros ne pourra échapper à son funeste destin.

    On sent tout de suite que l’auteur maîtrise aussi bien les lettres classiques que les disciplines scientifiques. On se régale avec un auteur très cultivé qui partage sa culture sans prendre les lecteurs de haut : c’est avec plaisir qu’au détour de tel ou tel passage on retrouve Homère, Thucydide, Aristophane, Fermat, Lovecraft, Edgar Rice Burroughs, Arthur C. Clarke…

    Tout n’est évidemment pas parfait :
    – c’est le 1er roman de l’auteur : ses autres romans présentent plus de vista
    – le personnage de Miralles est amené de manière forcée et frôle souvent le WTF !
    – le héros est plutôt froid et cérébral, d’où moult passages réflexifs (solution A) ou B) ?)

    Pour un peu on pourrait se retrouver entre Dan Simmons et Richard Morgan avec une intrigue qui gagne en fluidité et en limpidité par rapport à ces deux derniers.
    Finalement un livre très bien écrit, très bien rempli et ma fois déjà bien abouti.
    Un bien bel ouvrage qui a signé le début de carrière de l’écrivain espagnol multigenre !

    Une note ? Disons 8,5/10 pour trancher dans les hésitations…

    Albéric

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    L’Alliage de justice / Brandon Sanderson

    Posted By on 7 mai 2013

    Titre original : The Alloy of Law, 2011
    Orbit
    , 275 pages

    Le gunfight allomantique introductif promettait une belle ambiance entre western et steampunk. Il n’en est rien car Brandon Sanderson en pure produit des ateliers d’écriture nous livre un produit bien troussé certes mais aussi bien formaté.

    On entre rapidement dans un univers plus proche d’un comic victorien que d’un western steampunk, le système de la magie des métaux s’étoffe pour offrir des scènes d’action cinématographiques dans le style DC / Marvel. C’est fluide, c’est efficace, c’est rythmé et on identifie rapidement les personnages auxquels on pourra s’attacher (ils ne sont que 2 !).

    C’est mieux qu’un méd-fan mais l’univers est survolé : le worldbuilding est inexistant.
    Les multiples références aux héros divinisés de Fils-des-Brumes ne servent à rien, les multiples références aux exploits de Wayne, Wax et Miles dans les rocailles ne servent à rien et le cadre est minimaliste : on passe des salles de bal aux repaires de bandits en passant par le commissariat ou la batcave…

    Sur le fond l’histoire est un remake très édulcoré de Batman Begins.
    Dans la 1ère partie plusieurs semaines s’écoulent dans les ellipses qui séparent les chapitres qui nous permettent de découvrir l’univers de Fils-des-Brumes 3 siècles après les événements du Héros des Siècles.
    On retrouve un aristocrate vigilante qui s’associe à un side-kick action-humour et une jeune ingénue à la fois belle et intelligente. Cela lorgne carrément sur les terres de la Batman Family mais ce n’est pas assumé du tout. On retrouve un majordome complice et un l’armurier malicieux et on a même droit à fond idéologique douteux avec un gentil riche qui défend l’ordre établi contre des méchants révolutionnaires gauchos.
    Mais tout va bien : on évite le plagiat puisque ce n’est pas le héros qui s’appelle Wayne.
    La 2e partie est une traque de 48h se terminant par une longue scène d’action.
    On retrouve un gentleman baroudeur et un roublard transformiste qui doivent démasquer une mystérieuse conspiration et stopper les plans d’un super-vilain mégalomane et invincible doté de la robustesse d’un T-1000.
    Cela ressemble à s’y méprendre à du Wild Wild West mais ce n’est pas assumé du tout.

    Sur la forme les défauts sont nombreux ! Des tics d’écriture maladroits qu’on ne retrouve pas dans ses autres livres. Et que les branchouilles VOphiles ne viennent pas nous dire que la traduction de Mélanie Fazi est mauvaise…
    On retrouve ainsi une héroïne potiche au possible, une (non-)histoire de romance mièvre, des deux ex machina en voulez-vous en voilà, des cabotinages insupportables, un humour qui tombe parfois à plat, des dialogues parfois minimalistes, des descriptions parfois foireuses et quelques copier-coller qui piquent les yeux.
    Et comme d’habitude avec Brandon Sanderson l’épilogue nous en dévoile plus que tout ce qui a précédé pour obliger le lecteur à acheter la suite : c’est beaucoup de blabla pour faire avancer l’intrigue entre quelques scènes d’action longuettes ou quelques rebondissements forcés  et donc tout aurait largement tenu dans un BD de 50 pages.

    On est en droit d’attendre bien mieux d’un auteur bankable comme Brandon Sanderson.
    Un court roman qui sera fort plaisant pour le « tout venant » et les fans de Fils-des-BrumesSi vous ne connaissez pas l’auteur vous allez kiffer, si vous le connaissez déjà vous serez sans doute très déçu. Mais le lecteur averti se tournera vers le Frey de Chris Wooding, un western steampunk bien plus intéressant et le lecteur très averti se tournera vers le Grimnoir de Larry Correia, une épopée dieselpunk incontournable !

    Note : 6/10

    Albéric

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    L’Aube de fer / Matthew Woodring Stover

    Posted By on 6 avril 2013

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    Titre original : Iron Dawn, 1997
    Atalante, 470 pages

    « Tyr est petite mais vaste est le monde… »

    Dans les rues étroites de la cité-Etat de Tyr au XIIe siècle avant la naissance du Christ, Barra Coll Eigg Rhum nous présente une population cosmopolite : Phéniciens, Égyptiens  Hittites, Amorites, Indusiens, Grecs, Celtes et Pictes…
    Il était une fois une petite princesse picte qui rêvait de devenir une grande princesse orientale : l’année de ses 14 printemps cette petite rouquine s’embarqua sur un navire phénicien et se fit adopter par les marchands Péliarchus et Tayniz grâce auxquels elle apprit à devenir une redoutable négociante. Et après avoir aperçu un magnifique héros tout de bronze vêtu et sa blonde chevelure flottant au vent, à 18 ans elle décida d’entrer elle-aussi dans la légende en allant combattre pour les Murs de Troie, mais le destin en décida autrement…
    A 29 ans, Barra est devenue une guerrière accomplie, mais complètement fauchée au presque, qui rentre dans sa bonne vieille ville Tyr, accompagnée de Leucas Déodakaidès d’Athènes, un redoutable vétéran de la Guerre de Troie rencontré en Sicile, et de Khépéru de Thèbes, un roublard sehperankh banni d’Egypte.
    Mais entre bateaux coulés, caravanes pillés, entrepôts brûlés, meurtres en série et une mystérieuse histoire de malédiction lancée par un non moins mystérieux sorcier, la tension monte entre les 5 Grandes Maison dirigeant la cité : la Maison Penthédès dirigée par l’achéen Agapenthès, la Maison Meinéidès dirigée par le Sémite Idonosteus, la Maison Mursuwalli dirigée par le Hittite Xuxusimilli, la Maison Tomitri dirigé par l Égyptien Nephrol et la Maison Jephunah dirigée par l’Amorite du même nom.

    L’Aube de Fer forme un joli diptyque qui fait le choix de l’originalité en traitant du Proche-Orient à l’Âge du Bronze final

    La 1ère partie intitulée « le recrutement » prend d’un côté la forme d’un polar antique, dans une ambiance finalement assez proche de séries comme Garrett P.I. ou Vlad Taltos, et nous apprenons à découvrir les personnages et le fonctionnement du trio (« Leucas combat, Khépéru calcule et Barra… est Barra » dixit Leucas). Dans le même temps nous redécouvrons l’univers de l’Âge du Bronze finissant avec Barra nous contant un Extrême-Occident divisé en Vieilles tribus (les Pictes) et Nouvelles Tribus (les Celtes), avec Leucas nous contant les exploits des héros achéens et troyens, et avec Khépéru nous contant les us et coutumes de l’Empire des Horus Vivants.
    La 2e partie intitulée « la reculade ulate » est nettement plus violente, sombre sinon désespérée : les calamités s’abattent sur notre trio qui doit lutter seul contre tous et les nerfs des personnages et des lecteurs sont mis à l’épreuve. Mais Barra est une Picte et les Pictes ne capitulent jamais !!!

    Les 3 personnages principaux sont sympathiques et attachants : bien décrits et bien campés, ils n’ont toutefois pas livré tous leurs secrets malgré tout ce qu’on apprend d’eux en 500 pages.
    Avec Remmie, son acolyte, ses sbires, ses marionnettes et ses dupes, nous avons vilain flamboyant dont les apparitions constituent autant d’interludes qui nous racontent l’histoire du point de vue du méchant. C’est assez réjouissant finalement car dans cette optique, le qui et le pourquoi importent moins que le comment. Et là, les choses se corsent car c’est rapidement mission impossible pour Barra et ses amis.

    Les autres personnages sont beaucoup moins fouillés, mais contrairement à beaucoup d’autres séries on a pas du tout une impression de vide : le séduisant mais psychopathe Chrysios, les chefs des Grandes Maison et leurs seconds tantôt fidèles tantôt fourbes, les légendaires Myrmidons de Kamadès de Phtia, Lidios le tenancier d’auberge grande gueule, l’alchimiste Tekrop-nekt, le gouverneur Akhu-shabt, le roi de Chypre Démétor et sa suite, Péliarchus et sa maisonnée… sans oublier le fidèle canidé Graegduz !

    Le scénario mêle mystification et démystification en alternant low fantasy et high fantasy pour aboutir à un récit de Sword & Sorcery classique dans ses enjeux mais assez dynamique dans son déroulement.
    Entre la trilogie Troie de David Gemmell et le diptyque des Immortels de Michel Pagel, j’ai été particulièrement séduit par cette Aube de Fer car l’auteur a trouvé une formule équilibrée et harmonieuse : un traitement à la fois réaliste et fantastique, qui fourmille de détails historiques et mythologiques (que nécessite plusieurs lectures pour les apprécier à leur juste valeur) qui mêle à la fois action, émotion et aventure, moments lumineux et moments sombres avec des dialogues bien ficelés remplis d’humour ou de rage à l’image de Barra.
    Bref tous les ingrédients sont là, et il y avait matière à de nombreuses suites : malheureusement il n’y eut qu’une seule et celle-ci est non traduite, mais ceci est une autre histoire…
    (Jericho Moon est un démontage en bonnes et dues formes de l’Ancien Testament avec des Palestiniens résistant désespérément contre les Israéliens et leur Sombre Seigneur)

    Note : 8,5/10 (c’est de toutes les manières c’est un énorme coup de cœur !)

    Albéric

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    Shurato / Série d’animation / Fantasy

    Posted By on 6 avril 2013

    Shurato / Tenkū Senki Shurato (1988-1989), c’était l’un des concurrents de Saint Seiya parmi le genre des jeunes guerriers en armures.
    Toshihiko Nishikubo et Takao Koyama ont œuvré pour Tatsunoko Production :
    au final 38 épisodes, 6 OAV et 2 mangas.

    On s’inspire cette-fois ci de la mythologie hindoue (vue par le bouddhisme japonais) mais la parenté avec Saint Seiya est criante.
    Tengukai = sanctuaire, Palais ambulant = Enfer, Vishnu = Athéna, Shiva = Hadès, Devas = chevaliers, Asuras = Spectres, Hachibushu = chevaliers d’or, 12 Empereurs = Juges, Mandala des Rois Animaux = Athena Exclamation, shakti = armures, soma = cosmoénergie… Et pour faire bonne mesure Indra = Saga et les défenseurs du bien vont s’entredéchirer avant l’arrivée du véritable ennemi.
    La ressemblance est telle que certains épisodes se ressemblent comme 2 gouttes d’eau (situations, dialogues, dénouements).

    Les petits plus :
    – l’histoire tient bien la route, peu de répétitions dans les péripéties des 38 épisodes
    (c’est un peu comme si Saint-Seiya démarrait directement à l’épisode 40)
    – l’univers oriental est pas trop mal rendu, le charadesign typique des 80’s est réussi
    – les openings sont assez cools et les musiques sympathiquement eighties
    (mais dans ces 2 derniers cas, la comparaison avec Saint Seiya est dure)
    – la conclusion philosophique : le mal est en chacun de nous, le vrai combat c’est de ne pas succomber à la tentation
    – le subtext gay, encore… (une nymphette à moitié nue court après le héros toute la série, mais celui ne pense qu’à retrouver son ami d’enfance Gai)
    – finalement pas trop de trucs vraiment grosbills qui viennent tout gâcher

    Les petits moins :
    – les shoneneries douteuses, mais bon depuis le temps on est accoutumé aux monologues sur l’espoir et l’amitié
    – les inégalités de rythme : on traine un peu au départ puis on accélère de plus en plus
    – les inégalités de réalisations : sur la fin des tâcherons ont bâclé certains épisodes
    – des gimmicks typiquement japonisant dans le palais ambulant (tentacules & cie)
    – persos pas vraiment bien mis en valeur en dehors du couple Shurato / Gai
    (sauf Reiga le roi Karula, qui est pas mal)
    – on se sent obligé d’affubler la combattante féminine d’une histoire d’amour très compliquée et très mélodramatique (fort heureusement, ce n’est pas très prégnant)

    L’opening de l’anime pour la route ! http://www.youtube.com/watch?v=J_TdSxVRRMU

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    A Rebrousse-Temps / Philip K.Dick

    Posted By on 19 février 2013

     

    Dick 

    Titre original : Counter-clock world, 1967
    J’Ai Lu, 256 pages

    Comme souvent avec Dick, il y a à la base de ce roman une idée de génie. Il s’agit ici de l’effet Hobart ou inversement du cours du temps. Techniquement parlant, les morts sortent des cimetières et se mettent inexorablement à rajeunir, jusqu’au jour où ils réintègrent la matrice maternelle. On enfile le matin des vêtements sales et chiffonnés pour les retirer le soir propres et impeccablement repassés. On inhale de la fumée de cigarettes que l’on souffle dans des mégots. Ceux-ci se reconstituent jusqu’à former une nouvelle cigarette. Vous avez compris le principe : tout est inversé. Et de ce point de vue c’est une vraie réussite. Le roman fourmille de détails allant dans ce sens.

    Comme parfois aussi avec Dick, l’intrigue n’est pas à la hauteur. Peu après l’exhumation de l’Anarque Peak, allégorie de Malcom X et chef spirituel d’un mouvement noir américain qu’il poussa à la révolte, différents groupes d’influence (Vatican, le Conseil des Oblitérateurs, les Udites, un mouvement pro-noir…) vont vouloir s’emparer du fraîchement revenu à la vie dans le but de tenter d’influer sur le cours de l’histoire. Les péripéties entourant la traque de l’Anarque ne sont malheureusement ni convaincantes ni palpitantes.

    Au final c’est un roman assez moyen. Une idée géniale mais très mal exploitée. Un beau gâchi.

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    La Maison des Derviches / Ian McDonald

    Posted By on 12 février 2013

     

    Derviches

    Titre original : The Dervish House, 2010
    Denoël, coll. Lunes d’Encre : octobre 2012
    544 pages

    Istanbul – 2027. Au cœur des fêtes célébrant le 5ième anniversaire de l’adhésion de la Turquie à la Communauté Européenne, un attentat suicide dans le tramway va impacter plus ou moins directement la vie de 6 habitants de la Maison des Derviches de la place Adem-Dede. Un bâtiment ayant anciennement abrité les membres d’une confrérie religieuse musulmane aujourd’hui reconverti en habitations. On va ainsi suivre les destins de Can qui du haut de ses 9 ans va jouer au détective à l’aide de son bitbot transformable à volonté, un robot doté d’une IA et bourré de capteurs et de caméras. Necdet était dans le tramway quand la bombe a explosé. S’il s’en est physiquement sorti indemne, sa vie a irrémédiablement basculé puisqu’il voit désormais des Djinns et est devenu capable d’édicter des prophéties sur un simple regard. Ayse est une antiquaire à qui un mystérieux commanditaire demande de rechercher un vestige archéologique d’une rareté exceptionnelle : un homme mellifié (un homme momifié plongé dans un sarcophage rempli de miel). Adnan est un trader qui n’a pour morale que l’argent. Avec 3 de ses amis d’enfance, il reconstitue les Ultralords de l’Univers, les héros d’un manga. Ils seront à l’origine de la plus grande escroquerie du siècle. George Ferentinou est un vieux grec émigré rongé par le remord. Cet ancien prof d’économie s’est pris d’affection pour Can qui représente à ses yeux « le fils qu’il n’a jamais eu. » Enfin Leyla est une jeune femme qui accumule les galères (pas de fric , pas de mec, pas de boulot…) . Le jour où elle est recrutée par une start-up en biotech va peut-être sonner pour elle la fin de ses problèmes.

    A l’instar du Fleuve des Dieux, Ian McDonald fait foisonner les concepts dans un pays émergeant. Cela lui permet de faire cohabiter les biotechnologies telles que la robotique et les nanotech avec des archaïsmes comme l’obscurantisme religieux ou les traditions sécurales. Et c’est là un véritable tour de force puisque cette Istanbul est criante de vérité. On y crève de chaud, les transports en commun sont bondés, les embouteillages quotidiens. On a l’impression d’entendre les clameurs de la foule quand on s’approche du stade de Galatasaray et de sentir une multitude d’effluves aux abords du grand bazar. A ce titre, j’ai adoré comme rarement les toutes premières pages qui nous font découvrir Istanbul par les yeux d’une cigogne. Dès cette intro j’étais pris dans les filets de l’auteur et n’allais jamais m’en défaire.

    Alors certes, le récit est un peu difficile au début. Mais d’une part c’est voulu. L’entrecroisement des fils narratifs se démêlant au fur et à mesure que l’intrigue se dénoue est ici parfaitement maîtrisé. Tout devient limpide à la fin rassurez-vous. Et d’autre part ça donne une véritable âme à cette terre du futur. Loin de l’âge d’or, souvent représenté en SF. Elle sera multiple et bruyante. Elle sera violente et s’agitera en tous sens. Elle ne sentira pas forcément la rose mais elle sera vivante. Et par dessus tout l’humain, dans toute sa multitude, sera toujours au coeur des enjeux.

    La Maison des Derviches est un très grand roman de science-fiction. Je le classerai même au-dessus du Fleuve des Dieux qui avait pourtant placé la barre très haut. Un nouveau sans faute pour cet auteur qui vient de gravir sans coup férir la plus haute marche dans mon panthéon des meilleurs écrivains de SF.

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    Omale – Intégrale 1 / Laurent Genefort

    Posted By on 21 janvier 2013

     

    omale 1

     

    Denoël/Lunes d’Encre : octobre 2012
    880 pages

    Heureuse initiative des éditions Denoël-Lunes d’Encre que cette Intégrale d’Omale. Au programme de ces quelques 1700 pages et 2 volumes très joliment illustrés par Manchu on retrouve 3 romans et l’ensemble des nouvelles parues à ce jour.

    Commençons par une petite présentation de cet univers. Omale est une sphère de Dyson. Il s’agit d’une gangue de matériaux ceinturant une étoile dans sa totalité. Sur la surface interne de cette sphère se trouvent les terres d’Omale, un monde en vase clos complètement coupé du reste de l’univers. Omale a une superficie de plusieurs milliers de fois la Terre. Elle est peuplée par trois races. Outre les humains, les puissants guerriers Chiles et les diplomates Hodgqins ont colonisé ses vastes étendues. Après des siècles de guerres acharnées, la paix a enfin été instaurée mais les ressentiments sont encore tenaces et la coexistence des plus difficiles.

    Omale est un univers qui fait la part belle aux secrets et aux mystères. Et chacun des épisodes de cette intégrale va nous permettre d’en découvrir quelques-uns. A ce titre, je déconseille la lecture du 4ème de couverture qui gâche partiellement ce plaisir de découverte.

    Voici mon avis sur le premier volume :

    Le premier roman, « Omale », m’a énormément fait penser à Hypérion de par sa conception. Et vous reconnaitrez qu’on peut difficilement trouver mieux comme référence. Ainsi, 6 pèlerins ne se connaissant pas les uns les autres et appartenant aux trois races omaliennes vont mystérieusement se trouver en possession d’une coquille d’œuf et d’un billet de dirigeable. Qui les a conviés ? Dans quel but ? Autant d’interrogations qui, vous l’imaginez bien, ne trouveront réponse qu’à la toute fin de l’histoire. Chemin faisant, et au cours d’une passionnante partie de « fejij », un jeu similaire aux échecs mais en bien plus complexe, les 6 pèlerins vont tour à tour narrer leur histoire aux autres afin de tenter de comprendre ce qui les unis dans cette épopée des plus nébuleuse. Quand je vous disais que ça ressemblait à Hypérion !

    En toute honnêteté, j’avoue avoir eu un peu de mal au début à assimiler les différents concepts spécifiques à Omale. Attention je ne dis pas que c’est mal écrit hein. Bien au contraire d’ailleurs, le style est très visuel. Seulement l’univers est tellement riche qu’il faut un peu de temps pour tout assimiler. Et après on en prend plein les mirettes ! On a l’impression d’avoir un vrai monde en mouvement ! A ce titre le travail de Laurent Genefort est colossal. Ca fourmille littéralement de détails. Histoire de pinailler,  j’ai aussi ressenti quelques petites facilités scénaristiques ou coïncidences pas super crédibles. Mais au diable que tout celà car en toute sincérité, c’est vraiment une lecture très enthousiasmante. On ne s’ennuie jamais, l’intrigue est toujours en mouvement, les personnages sont intéressants, le souffle et l’exotisme sont au rendez-vous. Une très très bonne entrée en matière donc.

    Retour en arrière de 700 ans pour « les Conquérants d’Omale ». Au plus fort de la guerre entre les humains et les Chiles. Et quand il parle de guerre, Laurent Genefort ne fait pas dans la demi-mesure: un front s’étalant sur plusieurs fois la superficie de la Terre et des bataillons de millions de guerriers. Le principe narratif est ici totalement différent. On va suivre trois trames à priori indépendantes les unes des autres, mais forcément elles finiront par se rejoindre à la fin. On va d’abord suivre un commando humain ayant pour mission de mettre la main sur un canon ennemi. Exploit devant permettre à l’humanité de renverser le cours de la guerre. Un road-movie militaire en blindé vraiment bien fichu. La transformation de Jérémiah, de par le poids des responsabilités est très bien rendue. La 2ème intrigue est celle d’une expédition de cartographes qui doit faire toute la lumière sur un terrible cône d’obscurité qui se repend inexorablement sur Omale, insufflant sur son passage froid et désolation. Ambiance Horde du Contrevent inside. Et enfin une délégation de diplomates appartenant aux trois races doit rencontrer un Aezir, une mystérieuse créature vivant dans l’espace, afin de renouveler l’allégeance des Omaliens envers ces êtres quasi-divins. Meurtres et trahisons au programme de ce 3ème récit.

    On a encore droit à des tonnes de révélations. Et on sent bien que l’auteur en a encore sous la pédale. J’ai encore plus aimé ce tome ci que le précédent. D’une part parce que je n’ai plus rencontré le problème d’immersion mais aussi parce que les trois trames sont bien plus cohérentes.

    Franchement si c’était possible, je partirais bien en vacances sur Omale moi.

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    Le Berceau du Chat / Kurt Vonnegut Jr

    Posted By on 11 janvier 2013

     

    berceau du chat

     

    Titre original : Cat’s Cradle, 1963
    Seuil, coll. Points – 320 pages

    Un livre en marge des littératures de l’imaginaire. Une espèce d’hybride entre blanche et SF difficilement identifiable. Pas le genre de livre qu’on rencontre tous les jours donc.

    Et pourtant j’ai beaucoup aimé. Car j’ai trouvé là un petit bouquin (320 pages seulement) épatant. Vonnegut sait aborder des thèmes on ne peut plus sérieux comme la religion ou le rapport au pouvoir avec tout le recul que permet l’ironie et l’absurde.  Il sait nous distraire tout en nous amenant à réfléchir. Cet auteur est vraiment très doué. Je me suis surpris plus d’une fois à relire un paragraphe tout simplement parce que je le trouvais très bien écrit.

    L’histoire reste pour moi anecdotique puisque ne servant que de prétexte, mais en voici néanmoins le pitch : Que faisait le Dr Hoenikker, le père de la bombe atomique, le jour où Hiroshima a été pulvérisée ? C’est ce que Jonas, un journaliste, va essayer de découvrir pour la rédaction d’un article. Il va pour ce faire rencontrer les enfants de feu le scientifique, une fratrie iconoclaste et bourrée de complexes, mais aussi découvrir l’île de San Lorenzo, une république bananière terre fondatrice du bokononisme. Une religion dont le premier concept est que toutes les vérités sont des mensonges éhontés.

    Un récit déjanté mais ayant le mérite de toujours rester cohérent et extrêmement lisible. Si le cœur vous en dit, une lecture rafraichissante entre 2 tomes de la roue du temps.

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    Chroniques des Années Noires / Kim Stanley Robinson

    Posted By on 27 décembre 2012

    Chroniques

    Titre original : The Years of Rice and Salt, 2002
    Pocket, coll. Science-Fiction: novembre 2006
    1024 pages

    Que se serait-il passé si la peste du moyen-âge avait complètement fait disparaître l’Europe ?
    C’est l’ambitieuse question à laquelle Kim Stanley Robinson tente de répondre au travers de cette volumineuse (+ de 1000 pages !)  uchronie. Une véritable gageure.

    Mais il fallait bien ça pour narrer cette histoire alternative de notre planète. Une histoire qui va voir l’Islam et la Chine, les deux autres grandes civilisations s’opposer et se disputer la suprématie mondiale. C’est sous le prisme de 10 épisodes sensibles s’étalant du 14 au 21ème siècle que cette gigantesque fresque va nous être dévoilée.

    Pour faciliter l’immersion et donner du lien à ces récits à priori sans rapport les uns avec les autres, Robinson met systématiquement en scène les réincarnations successives de 3 mêmes personnages. On les reconnaît aisément car ils conservent à chaque fois la même initiale. Ils deviennent tour à tour alchimiste de Samarkand, médecin Ottoman, samouraï Nippon,  philosophe Chinois, ou bien encore féministe musulmane inventeur de la bombe nucléaire… Difficile de faire mieux du point de vue dépaysement. A ce titre je trouve la couverture particulièrement réussie et très évocatrice.

    Mais la grande force de ce livre est que malgré l’ampleur du propos, on ne nous assène pas un cours magistral. On n’a jamais l’impression de subir le cours rébarbatif d’un austère professeur d’histoire. Au final ce sont toujours les hommes qui se retrouvent au centre du récit, et souvent dans une vision intimiste de leur vie quotidienne. Car Robinson n’oublie pas que se sont les hommes dans leur volonté de progresser qui ont fait l’histoire, pas les dates et les  batailles.

    Un sans faute pour cette immense saga qui peut sans le moindre doute être classée au rang de chef d’œuvre.

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    Mask of the Betrayer

    Posted By on 6 octobre 2012

    Il est des jeux qui marquent. Les RPG en font souvent partis, car ce sont des jeux où on s’investit pleinement dans son personnage. Mais parmi même les RPG certains laissent un souvenir impérissable. Avec les années je pense commencer à avoir acquis une certaine expérience de la chose. J’ai tâté des différentes sagas à savoir les baldur’s gate, les Gothic, les Divinity, les neverwinter, les icewind, les witcher, les two worlds etc etc. La plupart sont excellents, voir même tous dans cette liste. Mais Mask of the Betrayer a pour moi ce quelque chose en plus.

    Déjà remettons dans le contexte. Mask of the betrayer est la 1ere extention de Neverwinter Nights 2. Neverwinter Nights rappelons le est une saga de jeu de rôle composée de 2 volets ayant chacun 2 extensions. Nous avons là du RPG suivant les règles D&D et situé dans la campagne des Royaumes Oubliés tout comme Baldur’s Gate et Icewind Dale par exemple. Et pour être précis dans la région de … Neverwinter Nights. Padhiver dans la tracuction française. Donc le 1er volet est plus que correct, une campagne solo de bonne facture, un multi joueur sympathique. Mais pas pour autant le jeu qui vous marque au fer rouge comme BG par exemple. Les 2 extensions qui suivent rallongent la durée de vie, surtout hordes of the underdark, qui nous livre un combat final épique.  Sort ensuite le 2ème volet et là aussi le solo est correct mais pas transcendant. Bon évidemment visuellement le 2 enterre le 1 mais le scénar bien que correct ne nous fait pas vibrer plus que cela  même si de bonnes idées telles que la gestion du château ou de ses compagnons sont sympas. On a même un combat  qui rappelle celui de Hordes of the Underdark quand il faut défendre ce château chèrement (en pièce d’or) retapé. Bon donc je le finis, ok c’est cool mais bon. Et là sort Mask of the Betrayer. Alors comme toujours je m’achète l’extension. Et là le choc, la pépite de toute la sage NWN y compris la 2ème extension Storm of Zéhir qui malgré ses qualités ne fera pas d’ombres à MOTB.

    Déjà comment çà commence ? On reprend son perso du jeu de base et on est bien content de le retrouver. On se réveille dans une grotte au Mulsantir à l’autre bout du continent par rapport à Padhiver. Et là on est pris dans une spirale de féerie et de magnificence  Car le scénar est travaillé avec amour. Il n’est certes pas sans rappeler Planescape par moment, car on est amnésique et victime d’une malédiction. Cette malédiction qui est aussi une force ne vous lâchera pas de toute l’aventure et avec des compagnons de route vous allez chercher à la vaincre. Des compagnons oui mais alors là je peux vous dire que les auteurs les ont bichonnés. Des personnalités fortes et charismatiques et des dialogues à nouer avec eux qu’il faut mener avec subtilité, les comprendre, les mettre en confiance et se livrer à eux. Donc on a pas là la fine équipe habituelle le guerrier le mage l’archer etc mais des compagnons de routes qui doutent, qui s’interrogent et qui font front ensemble. Une équipe, une vraie.

    Ajoutons donc à cela une ambiance mélancolique et contemplative à travers des paysages bucoliques, accompagnées de mélodies parfaitement en accord avec l’ambiance. Par exemple celle-ci qui à mon sens est la plus belle, elle est d’ailleurs reprise dans SOZ pour le menu de lancement.

    Pour conclure, je trouve que MOTB est une des plus belles expérience du RPG car il réunit à la perfection un certain nombre de qualité telles que l’immersion, la contemplation, et l’envie de toujours continuer. Et quand ça finit on est triste. Mais comme on est gaté jusqu’au bout on a le droit à plein de fin différentes.

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