Toutes les nouvelles se déroulent dans le même univers que Martin explore à travers toutes ses nouvelles / romans de SF. Rien de super novateur mais c'est normal vu que ça date des années 70.
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Par la croix et le dragon (1978)
J'ai déjà du en parler quelque part mais c'est pas grave. En gros Martin nous place dans la peau d'un Chevalier du Christ, un clerc envoyé aux quatre coins de l'univers pour écorcher de l'hérétique. Au fil des ans sa foi s'est petit à petit réduite à néant, et voilà qu'on lui parle d'un prophète qui revisite complètement l'histoire biblique à travers un ouvrage à succès : Par la croix et le dragon. Passionné par l'épique récit, c'est avec une certaine excitation que notre inquisiteur part combattre le chef de cette Eglise pour le moins atypique...

Très bonne nouvelle, que j'ai relue avec un plaisir non feint. Martin réfléchit intelligemment (comme toujours) sur du rôle même d'une religion, avec drôlerie et pertinence.
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Aprevères (1977, inédite)
Cette fois l'héroïne est une jeune fille du nom de Shawn, elle vit au sein de ce qu'elle appelle une "famille", une sorte de clan en fait. Sa planète subit le grand-hiver depuis huit ans : le froid est partout. Lors d'une excursion (une chasse probablement, elle possède un arc et un couteau) loin de son village, son compagnon est blessé par un "vampire". Shawn tente de le sauver en sacrifiant des rations de nourriture, en vain. Seule et quasi condamnée, Shawn tombe soudain sur une mystérieuse construction de métal autour de laquelle des fleurs bleutées résistent miraculeusement au froid. A l'intérieur, une sorcière l'y attend.

Dommage que l'on comprenne si vite ce que manigance l'étrange sorcière car l'intrigue tombe un peu à plat. Néanmoins cette nouvelle reste agréable et plutôt originale. La fin m'est apparue comme très mystérieuse... J'aimerais bien en discuter avec quelqu'un du forum !
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Vifs-amis (1973, inédite)
Très connus des voyageurs stellaires, les "cligneux" sont des petits organismes constitués d'énergie qui flottent dans l'espace et se nourrissent de débris flottants. Les "sombres" sont en quelque sorte leur doubles maléfiques, beaucoup plus gros (taille d'un homme) et très dangereux pour l'homme. En tentant de percer le mystère de ces êtres voyageant à vitesse de la lumière, les humains ont découvert qu'il était possible de fusionner avec les "sombres" pour devenir des "vifs-amis", des hommes (avec leur conscience d'hommes) qui voyagent à la vitesse de la lumière et qui peuvent voguer indéfiniment dans l'espace, sans toutefois pouvoir supporter la gravité d'une planète. Devenir "vif-ami", c'est le rêve de Brand, mais le rituel est risqué. Si sa compagne Melissa y est parvenu, lui n'a pas le courage. Les "sombres" le terrifient. Séparés par le vide de l'espace, les anciens amants ne se voient presque plus. L'un vit sa vie d'humain, l'autre son existence de "vive-amie". Ils sont devenu bien trop différents, leurs préoccupations ne sont plus les mêmes... Pourtant Brand l'aime encore.

Une chouette nouvelle, triste et poétique. Au delà de la trame SF, l'histoire est toute simple et peut facilement servir de métaphore à des situations bien plus terre-à-terre. Un bon moment !
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La cité de pierre (1974, inédite)
Le monde-étape est une planète servant d'escale à de nombreux vaisseaux. Sa partie habitée n'est constituée que d'un spatioport et de sa cité (protégés des vents par d'immenses pare vents construits par une civilisation désormais éteinte) auxquels est accolée la cité de pierre, immense labyrinthe poussiéreux habité par des parias et des sans-vaisseau. Holt est l'un deux. Il ne reste plus grand chose de son équipage déchu (deux se saoulent à longueur de journée, l'un tente de percer les secrets de la cité de pierre en la cartographiant...), et son seul espoir est de pouvoir s'engager sur un autre vaisseau afin de quitter cette foutue planète. Tous les jours il se présente à l'embauche et tous les jours il se fait renvoyer de la même façon. En attendant son heure, il vit dangereusement en cambriolant les huttes des Cédrans, extra-terrestres visqueux complètement apathiques durant la journée mais terriblement efficaces la nuit. Pour ne pas sombrer dans le désespoir, Holt se remémore son passé...

Une nouvelle très sombre mais vraiment fascinante. Les talents de conteur de Martin m'ont encore bluffés. La fin complètement barrée m'a quelque peu surpris !
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La dame des étoiles (1973, inédite)
Fraîchement débarqués que le Caillou, la Dame des étoiles et son compagnon le Môme d'or tombent dans un piège vicelard. Ils finissent violés au fond d'une ruelle et y perdent même leurs pass d'identité. Impossible alors de récupérer leur vaisseau : les voilà bloqués au sol, perdus dans une ville hostile où règne le terrible Marquis. Ce dernier fait la loi, avec à ses ordres le vilain Crawney et l'odieux Chat Boîteux, mi-homme mi-chat. Les deux infortunés n'ont d'autre choix que d'accepter l'aide de Hal le Poilu, proxénète notoire mais plutôt réglo. Il leur offre sa protection, mais eux doivent bien évidemment bosser pour lui. Problème : Hal décide un jour de "louer" le sublime Môme d'or aux aristocrates du coin (plutôt que de le laisser faire le tapin), le séparant ainsi de la Dame des étoiles qui se révèle être amoureux de lui, en dépit de son étonnant mutisme. Elle décide de prendre les choses en main...

Alors là je ne sais pas ce qu'à pris Georges mais c'était sûrement de la bonne. Une sorte de conte SF aussi délirant qui rafraîchissant. Miam !
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Les rois des sables (1979)
Kress est un bourgeois qui ne sait pas quoi faire de ses thunes et de son temps. Sa passion ? Les animaux exotiques, les plus répugnants possibles. Alors qu'il recherche une nouvelle bébête pour remplacer les dernières (qui se sont entretuées durant sa courte absence), il tombe sur une mystérieuse boutique emplie de brume. C'est là qu'une femme nommée Wo va le convaincre d'acheter des rois des sables, sortes d'insectes communautaires au comportement surprenant. Elle lui présente quatre colonies (de couleur différentes) qui construisent des châteaux de sable et se font la guerre, concluant alliances si besoin est. Chaque "armée" est contrôlé par une "gueule" (sorte de reine enfouie sous le sable à qui les "mobiles" apportent de la nourriture). Mais ce qui convainc Kress, c'est leur capacité de reproduire le visage de leur dieu : le sien en l'occurrence. En effet les rois des sables savent sculpter avec talent un visage projeté par hologramme. A l'intérieur de son ancien aquarium à piranha, rempli de sable pour l'occasion, Kress fait installer quatre colonies. Fier de son acquisition, il organise rapidement des soirées avec des amis. Affamées depuis des jours, ses créatures deviennent féroces et c'est le carnage assuré lorsque les convives leur lancent des restes de nourriture ou d'autres animaux. Tout le monde fait des paris et les petites fêtes se passent à merveille. S'adaptant parfaitement à leur nouvelle prison de verre, les rois des sables grossissent et font rapidement le double de leur taille de ceux du magasin. Un jour Kress remarque que sur les quatre châteaux, son visage sculpté semble légèrement déformé, presque maléfique...

Une nouvelle brillante et extrêmement bien rythmée. Quand Martin mixe la SF avec l'horreur, mieux vaut avoir l'estomac bien accroché.
En clair, la qualité des récits est un peu inégale. Seule la nouvelle éponyme frise l'excellence. Néanmoins, chaque histoire dévoile une nouvelle facette du fameux univers SF de Martin... et la variété est belle et bien au rendez-vous. Si on oublie la deuxième nouvelle qui n'est que "sympathique", on navigue en permanence dans le "bon" tendance "très bon". Pour le moment, c'est quand même le moins réussi des recueils de Martin sortis en français, mais ça reste franchement recommandable, de part son originalité et un style (déjà) impressionnant.