Constantinople / Jack Hight

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Albéric
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Constantinople / Jack Hight

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Résumé de Constantinople :
An 1453. Depuis plus de mille ans, les imposantes murailles de Constantinople ont protégé la capitale de l'Empire romain d'Orient, le plus éloigné avant-poste du christianisme. Mais désormais, des colonnes interminables de soldats turcs recouvrent la plaine devant elles, leurs imposants canons braqués vers les remparts. C'est la force la plus redoudable que le monde a jamais vue. Aucune armée européenne ne viendra : les derniers croisés ont été mis en pièces par les Turcs sur les plaines du Kosovo. Constantinople ne peut compter que sur elle. Et la trahison est dans l'air. Trois personnes vont se battre pour le destin d'un empire : le jeune sultan turc, Mehmed, rentré d'exil et prêt à tout pour prouver sa grandeur, une princesse byzantine obstinée, qui a juré de protéger sa ville, et un mercenaire endurci, Giovanni Longo, qui a des comptes à régler. Mais c'est le soldat qui va faire face au plus difficile des choix : alors qu'il se prépare à ce qu'il pense être sa dernière bataille, il fait une découverte qui va lui donner une raison de vivre.

Un roman historique très classique mais assez solide, dans la lignée des films hollywoodiens en technicolor de la grande époque, qui nous raconte la chute de Constantinople en 1453 à travers plusieurs points de vue qui nous font passer d’un camp à l’autre :
- le POV byzantin est consacré à la princesse Sophie Dragasès, femme forte et cultivée, strong independant woman avant l’heure, qui souhaite échapper à la fatalité du mariage et à la tyrannie de la femme au foyer
-le POV chrétien est consacré au chevalier génois Longo, qui a pris sous son aile le jeune anglais William
Cet ancien janissaire contre son gré (comme tous les janissaires au départ enfants esclaves issus du devshirme) a quitté l’armée turque avec un ami, Ulu leur grand capitaine qui lui doit une vie, et un ennemi juré, le Grand Vizir Halil qui a tué ses parents et qu’il s’est juré de tuer avant de trépasser
- le POV turc est consacré au sultan Mehmet le conquérant, souvent vu par les yeux de son épouse Sitt Hatun
L’auteur nous présent un souverain indécis, qui ambitionne le titre de conquérant mais est raillé de celui d’érudit, qui vit dans l’ombre de son père Mourad qui ne perd pas une occasion de lui rappeler sa médiocrité…
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La première partie conte les 5 années qui précèdent le conflit, et la manière dont les personnages principaux et secondaires sont amenés à s’allier ou se combattre sous les murs de Constantinople. Personnellement, je l’ai trouvée selon moi dispensable la vendetta Grimaldi n’existe que pour ramener Longo en Orient, la mission diplomatique byzantine auprès du pape ne débouche sur rien et on se perd en intrigues familiales à la Dallas côté ottoman…
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La deuxième partie voit se dérouler le siège proprement dit, et pour un livre justement intitulé Siege en VO, le récit est plus riche en intrigues et en romances qu’en actions militaires (ça m’a fait sourire qu’on parle d’attente insoutenable après quelques jours, et de siège interminable après quelques semaine à une époque où un siège pouvait plusieurs mois voire plusieurs années). Car côté romance, nous avons pages mal de pages consacrés à un triangle amoureux entre le chevalier Longo, la princesse Sophie et le mégadux Luc Notaras côté chrétien, et les efforts de Sitt Hatun pour reconquérir son époux malgré les efforts de la favorite Gülbehar côté musulman. Alors que côté action, la guerre navale, la guerre de sape, les duels d’artillerie et les assauts des remparts sont un peu survolés… (Sans parler des tentatives d’assassinat perpétrées pas Carlos de Séville qui n’amènent rien : c’est plutôt raté ce truc là)

Si l’auteur ne résiste pas à l’occasion de s’appesantir sur le us et coutumes du despotisme oriental et des complots de harem entre odalisques, pleins d’esclaves lascives, de loyaux eunuques et de fourbes empoisonneurs…
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Avec la tragédie d’un souverain qui met à mort son enfant qu’il pense être le fruit d’un adultère, pour faire de son héritier un fils qui n’est pas le sien...

Mais c’est tout à l’honneur de l’auteur de ne pas céder au manichéisme : il y a moult musulmans parmi les défenseurs de Constantinople et moult chrétiens parmi les assiégeants de Constantinople. De plus, chaque camp est divisé entre traîtres et patriotes. Ah ça, certains puent la mentalité collabos… Nous parmi les assiégés le moine Gennade qui préfère livrer l’Empire byzantin à l’ennemi que d’envisager la possibilité de perdre ses privilèges et qui espère le très honorifique et lucratif poste de Patriarche en échange de sa trahison, bref un immonde crevard prêt à tout et au reste. Nous avons parmi les assiégeants le Grand Vizir Halil, qui en bon descendant de Jaffar ambitionne de se débarrer fils après s’être débarrassé du père pour devenir régent puis sultan à la place du sultan, bref un immonde crevard prêt à tout et au reste. Evidemment qui se ressemblent s’assemblent et les traîtres se sert les coudes !
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Les personnages principaux manquent de tessiture pour offrir une véritable plus value au roman par rapport à ses concurrents, et les personnages secondaires manquent presque tout le temps de caractérisation. Ainsi j’ai eu du mal à comprendre pourquoi l’auteur mettait en avant l’expérimenté Tristo et le jeune William Whyte pour ne pas en faire grand-chose au final… Quelques exceptions cependant : l’empereur Constantin, qui bien qu’abandonné de toute la chrétienté ne ménage pas ses efforts pour lutter contre la chute d’un empire qui a duré depuis plus de mille ans ; le mégadux Luc Notaras objet pendant plusieurs chapitres d’un chouette whodunit (trahira ou trahira pas ? ^^) ; le maître empoisonneur Isa d’Attalie qui essaie de sauver sa famille des griffes du Grand Vizir Halil…

L’ensemble reste plaisant et cela se lit bien et vite en raison d’une prose simple mais efficace, qui nous offre quelques descriptions gastronomiques assez savoureuses. Mais au final j’ai préféré le film qui raconte la même histoire vue du côté turc : Fetih 1453 du réalisateur Faruk Aksoy, sorti en 2012, qui malgré un nationalisme évident offre lui un souffre épique sans pour autant travestir la réalité historique (on retrouve d’ailleurs les mêmes passages, ce qui est normal puisque que les deux œuvres traitent du même sujet ne puisant aux mêmes sources historiques).
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