[Cycle] La Campagne des Ombres / Django Wexler

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Albéric
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[Cycle] La Campagne des Ombres / Django Wexler

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Résumé du tome 1 : Les Mille noms
Dans le désert de Khandar, une mystérieuse et sinistre magie, oubliée depuis des siècles, est sur le point de ressurgir des ténèbres. Marcus d’Ivoire, capitaine des Coloniaux de Vordanai, s’est résigné depuis un certain temps à mener à bien sa mission dans un avant-poste loin de tout, où il ne se passe jamais rien. Mais une Winter Ihernglass fuit son passé en se faisant passer pour un homme et cherche à passer inaperçue. La voilà pourtant promue ! Elle va donc devoir renouveler ce nouveau défi et affronter de terribles épreuves.
Leurs destins à tous deux se retrouvent placés entre les mains d’un énigmatique nouveau Colonel, officiellement envoyé sur place pour restaurer l’ordre. Mais celui-ci poursuit ses propres buts, en lien avec la magie...

Merci Babelio, Masse critique, et Eclipse de m’avoir permis de découvrir la flintloque fantasy de Django Wexler.
C’est bien écrit, bien construit et bien traduit mais je suis vraiment dubitatif car je ne me suis pas pris au jeu alors que tout dans le 4e de couverture m’emballait et inconsciemment, je me suis mis à lire en diagonale les tonnes de dialogues qui n’apportent vraiment pas grand-chose à l’ensemble et difficile de ne pas faire de comparaison entre La Campagne des ombres et Les Elfes de fer.
On retrouve un régiment en disgrâce, inexpérimenté, mal équipé et mal préparé, est envoyé outremer mater une révolte indigène et retrouver coûte que coûte un trésor magique avant de mystérieux ennemis.
Mais là où Chris Evans piochait chez RA Salvatore, Django Wexler lui pioche chez Brandon Sanderson.


Niveau personnage l’auteur respecte étonnamment une stricte parité, états d’âmes des uns des autres y compris.
D’un côté nous avons le brave capitaine Marcus d’Ivoire entouré de quelques amis peu nombreux et peu approfondis qui nous offrent le POV des officiers. Le personnage pétri d’idéaux et de principe est carrément d’alignement loyal bon : il possède un agréable capital sympathie même s’il n’arrive pas à la cheville d’Ibram Gaunt (Les Fantômes de Gaunt de Dan Abnett pour le côté épique) et de Toubib (La Compagnie noire de Glen Cook pour le côté humoristique).
D’un autre côté nous la brave soldate Winter Ihernglass accompagnée entouré d’amis sympathiques certes mais très lisses qui nous offre le POV des hommes de troupe, et ce malgré sa fulgurante montée en grade à coup de deus ex machina.
On a également en interlude les POVs des rebelles, mais malgré le faible nombre de pages qui leur sont consacrées j’ai éprouvé du mal à remettre en place la grande prêtresse, l’assassin, le nécromancien, le général, les imans et les qadis
Le personnage qui est censément être au cœur du roman, le Colonel Janus, est finalement très peu montré… à l’image du héros rebelle le Fantôme d’Acier qui fait office de Zorro du désert !
Et on retrouve ce putain de défaut des Elfes de fer : certains perso sont nommés par leur nom ou leur prénom en fonction des scènes, donc on doit parfois attendre des dizaines voir des centaines de pages avant de pouvoir associer les 2…
Un petit dramatis personae au début ou à la fin aurait facilement levé les ambigüités.
Reste qu’on se retrouve avec 5 personnages principaux féminins dans un livre qui traite d’une guerre rude et sale : ou l’auteur a volontaire féminiser son propose pour partir à la conquête d’un public féminin, ou l’auteur comme son modèle l’auteur est mormon… Car si quelques indices laissent à penser que Winter est lesbienne, les romances initiées sont d’un grande pudibonderie, à l’image de la relation tout public entre Marcus et Jen.
Sinon bonjour la suspension d’incrédulité :
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2 femmes travesties en soldats dans la même armée et le même régiment qui viennent du même orphelinat… mdr !
Et puis Winter qui change de sexe pour disparaître mais pas de nom, ce n’est vraiment pas très très malin…


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Niveau militaire, tout est fait pour rappeler la campagne d’Egypte de Napoléon Bonaparte, le colonel Janus état censé être son alter-ego (l’auteur ne se prive pas d’inclure une tirade qui verse dans ce bon vieux Napoléon bashing) mais au final j’ai plus eu l’impression d’un remake de la Révolte des Cipayes qu’autre choses. D’ailleurs le livre ressemble pas qu’un peu aux livres de la série Sharpe se déroulant en Inde : Sharpe's Tiger, Sharpe's Triumph, Sharpe's Fortress
On est donc largement plus dans les guerres coloniales que dans les guerres napoléoniennes.
Et il faut attendre 150 pages sans intérêts consacrées à des problèmes de hiérarchie, d’intendance et ou manœuvres avant le 1er coup de feu ; et 1er affrontement se résume à une canonnade de mitraille…
Heureusement la bataille du Pont, largement inspiré de celle de Rorke Drift, est vraiment pas mal du tout !

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L’opération reconnaissance du groupe de Winter nous met dans le bain de belle manière et ensuite c’est un gros bordel où on ne sait plus qui combat qui, où, pourquoi et avec quoi. D’un côté c’est un peu incohérent, mais on est réellement plongé dans le chaos de la guerre. C’est presque du Dan Abnett (normal puisque que les 2 auteurs s’inspire du Sharpe de Bernard Cornwell), mais du Abnett light car mais si niveau poudre on est servi, niveau sang et sueur on reste dans le PG13…
Je me suis dit que 2 ou 3 batailles de cet acabit et on tenait un super bouquin.
Que nenni tout le reste du roman on se contente quelles que soient les situations de former le carré et c’est gagné.
L’auteur réussit même l’exploit de rendre plate la scène qui aurait du être la plus cool du roman.
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(le dernier carré dans l’oasis contre un horde de morts-vivants !)


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Le worldbuilding est très limité. A ce niveau on ne va pas très loin.
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L'Empire Vordanai remplace l’Empire Britannique à la tête d’un ersatz d’Occident chrétien divisé entre protestants progressistes et catholiques rétrogrades (oui on n’échappa au catholique bashing), et un une clone d’une Egypte musulmane en rébellion qui n’évite aucun cliché (le prince fantoche, les fanatiques religieux, les indigènes impressionnables surnommés les peaux grises, le désert impitoyable et les nomades cruels).


Le magicbuilding est limité. A ce niveau on ne va pas très loin.
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Le concept central est très cool : en se liant à un djinn par la connaissance de son Vrai Nom, on peut s’approprier ses pouvoirs et devenir l’équivalent d’un superhéros ou d’un super vilain à la DC comics ou à la Marvel comics.
Sauf qu’il faut attendre les dernières pages pour que cela apparaisse et que cela soit explicité.
L’Infernavore rappelle le ka’kari noir de L’Ange de la nuit de Brent Weeks, donc on peut espérer un tome 2 plus fun et plus rythmé.
Mais c’est quand même ballot pour un livre fantasy qu’entre la nekya du début et l’attaque de la horde zombie à la fin, le surnaturel soit quasiment absent.


Le background est limité. A ce niveau on ne va pas très loin.
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On parle d’un grand sorcier devenu un tyran sous le nom de Roi Démon il y a 1000 ans. A mon avis il a du être vaincu par un adolescent orphelin annoncé par une prophétie et armée d’une épée magique il y a 1000 ans aussi…
Il y aurait des tensions entre Faucons et Colombes, mais tout est balancé dans une tirade et après on n’en parle plus avant la fin.
Il y aurait des tensions entre religieux progressistes (forcément protestants ?) et religieux ambitieux (forcément catholiques ?), mais tout est balancé dans une tirade et après on n’en parle plus avant la fin.
Je suppute une cabale néocons qui veut voler la magie des Khandarai pour établir un nouvel ordre mondial…
Mais j’extrapole à partir de quelques tirades seulement, tellement on nous explique rien.
Quant aux motivations des révoltés, elles se résument à chasser les étrangers.


L’intrigue est très linéaire, puisque qu’on passe d’un affrontement à un autre à la recherche des Mille Noms sans réelle surprise et entre l’introduction et le dénouement, le surnaturel tarde à montrer le bout de son nez et les révélations sur le Fantôme d’Acier et les Desolais ne marchent pas.
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Le Fantôme d’Acier qu’on n’a presque pas vu de tout livre est… roulement de tambour… Personne !
Les nomades desolais sont redoutablement organisés car… roulement de tambour… ils communiquent par héliographe !

La révélation de l’identité du sorcier occidental fait son petit effet, mais comme on n’en parle pas j’en avais totalement oublié son existence… Ce whodunit n’est vraiment pas au point !
Et bien sûr, plein des cliffhangers à la fin qui obligent à acheter la suite…
Tout clairement ne méritait pas autant de pages, et je m’attendais au moins à une belle ambiance du désert.
Une mention de la chaleur au début, une mention du manque d’eau à la fin et puis rien.
Les descriptions sont trop peu nombreuses et trop lisses pour s’imaginer beaucoup de choses.
Cela me fait de la peine d’écrire cela mais niveau Desert Adventures, Howard offrait plus d’action, plus d’ambiance et donc plus de suspens dans ses nouvelles consacrées à El borak écrites dans les années 1930…

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Et pour le plaisir de pinailler, quelques bonnes vieilles incohérences :
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- si les Mille noms sont si puissants, pourquoi les révoltés ne s’en servent-il pas ?
- s’il faut mettre les Mille noms à l’abri, pourquoi attendre la dernière seconde pour le faire ?
- si l’Empire Vordanai veut absolument gagner, pourquoi envoie-t-il les pires éléments avec le pire équipement ?
- si les Coloniaux sont si nazes et les indigènes si nombreux, pourquoi gagnent-ils systématiquement ?
(sans doute la supériorité manifeste de l’homme blanc ?)
Là j’ai un peu peur qu’on reprenne un cahier des charges américano-américain :
1) les WASP doivent toujours combattre dans le bon camp
Donc on a droit à des redondances sur les fanatiques religieux et sur les méchants eunuques…
2) les WASP doivent toujours l’emporter, y compris en dépit du bon sens
3) les WASP doivent être supérieur technologiquement
Du coup les canons pourris des Coloniaux marchent toujours mieux que les pièces de collection du Prince…



C’est plus appliqué et plus novateur que le tout venant fantasy, mais cela ne va pas très loin et cela tire à la ligne.
Quand Django Wexler s'inspire d'autres auteurs cela marche bien (la série Sharpe, la bataille du pont Rorke, la formule Sanderson), quand l'auteur est livré à lui même c'est vraiment naïf (un roi-sorcier tyrannique qui régnait il y a 1000 ans, une méchante église catholique, un Zorro musulman et un Sergent Garcia, des romances plates…).
C’est dommage car si l’auteur avait plus d’imagination ou plus d’ambition on aurait pu avoir un Mademoiselle de Maupin fantasy. Oui mais non, ne demandons pas aux diplômés d’écriture créative de faire preuve de créativité.
Amis néophytes, allez-y sans craintes car cela reste bien troussé.
Amis easy readers, vous pouvez y aller car il s’agit d’un début de cycle assez sympathique.
Hardcore readers, passez votre chemin il y bien plus palpitant y compris et surtout en flintloque fantasy.
Car le cycle des Poudremages de Brian McClellan lui est supérieur en tout point !
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