[Cycle] Génésia / Alexandre Malagoli

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Albéric
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[Cycle] Génésia / Alexandre Malagoli

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Cela partait bien avec un prologue qui fleurait bon le Secret de Ji.
Espoirs vite déçus car ensuite on retombe dans tous les clichés de la Big Commercial Fantasy :
un jeune plouc orphelin blablabla mais de noble ascendance blablabla promis à un grand destin blablabla car messie élu et guidé par la Prophétie blablabla pour retrouver l’Artefact Ultime blablabla conçu pour détruire définitivement un Mal Millénaire blablabla sur le point de renaître à nouveau blablabla… Quelle originalité !
Pour faire bonne mesure ajoutons des elfes dans les forêts, des nains dans les montagnes, des magos comploteurs, des prêtres intolérants pas catholiques, des rebelles caricaturaux tant ils semblent sortis d’un congrès de l’extrême gauche française du XIXe siècle, le princesse rebelle mais pas trop quand même, le mentor magicien, l’amie d’enfance histoire d’avoir un triangle amoureux…
Et pourtant Alexandre Malagoli ne ménage pas ses efforts pour rendre cela plus sympa qu’un énième machin anglo-saxons : on sent ainsi de très fortes influences moorcokiennes qui nous offrent des moments de dark fantasy (La Dernière Prophétesse, les Apôtres, qui comprennent un pote de Nurgle et le frère caché de Freddy Kruger, la Dévoreuse, l’Ecorcheur d’Âme, un bestiaire patibulaire…) et un gars qui a connu l’âge d’or du jdr en France tant le troll Aljir semble tout droit sorti de Runequest, et le nain Nimrod tout droit sorti de Warhammer. Cela serait intéressant d’entendre l’auteur s’exprimer à ce sujet.
Mais rien à faire des gimmicks tolkieniens viennent pourrir l’ambiance (le chapitre 10 du tome 2 semble directement sorti de la Communauté de l’Anneau, et ne parlons pas de ce paragraphe révélant que les nains ont creusé trop profond au cœur des montagnes, réveillant ainsi un mal indicible… mdr)

Car oui le worldbuilding inégale et inexploité donne envie quand même : des nains exilés, alchimistes, mercenaires ou mafieux, des elfes expatriés qui ont renoncé à leurs idéaux pacifistes en se faisant les bras armés des causes perdues, une monarchie esclavagiste luttant contre des révolutionnaires prêts à tour et au reste pour le Grand Soir, une Venise décadente construite sur des ruines millénaires, un empire théocratique intolérant et conquérant, un Su’adin qui ressemble fort aux royaumes du chaos moorcockiens (repris dans Warhammer).
Au-delà des clichés adolescents j’ai entrevue un univers dark proche de la BD la Compagnie des Lames.

On sent qu’il y avait beaucoup à écrire en narrant la guerre entre forces du mal menés par les Apôtres et monde libre censément mené par des Anciens Rois. Mais ces derniers, déjà divisés par le sort de l’un des leur, sont définitivement dépités et démotivés par l’évolution de leurs anciens royaumes, où les derniers loyalistes tentent vaillamment de sauver ce qui peut encore l’être alors que tout une faune de crevards carriéristes attend le meilleur moment pour tirer les marrons du feu.
Le désenchantement du monde gagné par la corruption est suggéré mais malheureusement pas exploité…
Les twists de la fin du 3ème tome les concernant sont vraiment bien sentis, mais mal amenés et mal exploités.
Et c’est con que le concept des Sceaux ne vienne que sur la fin. Il aurait été judicieux d’approfondir la chose.
Au lieu de cela l’introduction des Puissances, concept assez flou durant tout le cycle, vient vampiriser le truc.
Ainsi on en fait des caisses sur les fantastiques Aether… qu’on ne verra jamais à part le clone de Stormbringer.
Ainsi la disparition des Voies dracomantiques aurait eu plus d’impact si on les avait auparavant vues en action.
Ces écoles de magie rivales fonctionnant sur le principe des vases communicants rappelaient aussi celles de Warhammer.
Dragons, dragoniens, dracomancie… on se doute un peu de la tournure des choses quand même !
Ah tiens dragons, démons, humains et un super Homme-Dragon pour maintenir l’équilibre des forces cela ne vous rappelle rien ? Mais oui l’univers de Dragon Quest bien sûr !
Il faut aussi ajouter le Maître Plan du théocrate en chef qui vient en remettre une couche dans l’hétérogénéité.
En fait je vais être cash : dès qu’il n’y a plus de héros adolescents à l’horizon c’est nettement mieux.
Le POV de Finrad le Roi du Nord est bien fichu mais ne constitue que la portion congrue de l’ensemble.
Les interludes sont intéressants et viennent enrichir l’univers, mais ils sont trop peu nombreux et trop courts,
D’ailleurs j’ai trouvé d’assez bonne facture la nouvelle opposant le Prince et l’Âpotre (ambiance dark réussie)
Mais si j’ai eu peine à m’y intéresser, je dois avouer que les émois et les atermoiements adolescents sont bien mieux traité par Malagoli que par d’auteurs bien mieux côté que lui (on évite les mormoneries de Brandon Sanderson par ex)

Après 3 tomes de péripéties diverses parfois dispensables, le tome 4 paru 6 ans après tranche vraiment avec le reste.
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On a l’impression d’un jeu de massacre nihiliste et la Dernière Bataille tant redoutée part en cacahouètes avec les trahisons, les désertions, les assassinats et les suicides divers et variés. Un Saint Seiya Hadès fantasy quoi.
Mais ce n’est pas tout le monde qui peut rédiger une tragédie eschatologique versant dans la poésie noire.
Tout se dénoue dans une opération commando en Pourpremonde. Et l’affrontement final, mis en scène de façon très originale (pour représenter la folie des lieux qui s’empare de personnages), aurait pu être génial avec ses révélations et ses twists s’il n’y avait de gros trous (incohérences ?) dans le déroulement des faits.
Comme si l’auteur semblait pressé d’en finir au plus vite.


Clairement voire définitivement en dessous de Gaborit et Colin, mais il y a suffisamment de bons éléments pour ne pas être hostile à l’idée de retenter l’expérience (avec Wietzel cela commençait bien et puis cela devenait plan-plan, avec Malagoli c’est l’inverse).
Et puis c’est bien mieux que Brooks et Goodkind et, et cela vaut bien Eddings et Feist : la french BCF n’a rien à envier aux anglo-saxons, qu’on se le dise !
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