[Cycle] L'Empire Brisé et la Reine Rouge / Mark Lawrence

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Albéric
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[Cycle] L'Empire Brisé et la Reine Rouge / Mark Lawrence

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1) Prince of Thorns ; 2) King of Thorns ; 3) Emperor of the Thorns
A ce jour j'en suis au Tome 1. :wink:
On nous dit que c’est un page-turner sombre et implacable… et c’est assez vrai mais il y a vraiment à redire !

Le début est laborieux et pendant un temps plus ou moins long plane l’impression de lire un semi-ratage.
Les style est brut et direct à l’image de Jorg l’antihéros ado qui met la suspension d’incrédulité à rude épreuve : le chef de bande de 14 ans qui mesure 1m80, qui parle couramment 6 langues, qui connaît les us et coutumes du monde entier comme les mythes et légendes de l’Ancien Temps alors qu’il vit en vagabond depuis l’âge de 9 ans … Comment voulez-vous y croire ?
La narration à 1ère personne permet saisir l’ampleur de la violente amoralité du personnage pour ne pas dire de sa psychopathie, mais le rythme est particulièrement haché par un détestable découpage en chapitres de 5/6 pages, d’où le côté famélique des descriptions qui auraient pu ajouter une forte plus value à l’atmosphère délétère du roman.
Ce n’est pas un hasard si cela gagne en qualité quand les chapitres eux gagent en nombre de pages.
De plus on a de nouveau droit au coup des citations de début de chapitres qui émergent plus qu’immergent le lecteur et à une tripotée de flashback censé nous expliquer comment Jorg en est arrivé là. Cela n’aurait pas été plus simple de distiller ces explications dans le puzzle des citations ou au contraire de les ressembler dans 2 ou 3 chapitres plus touffus pour mieux profiter de sa quête de vengeance ??? (ou pas de bonne solution in fine…)

Passons au(x) personnage(s) :
Jorg est un sociopathe. Il n’a d’affection pour rien et personne. Bref, tout n’est qu’instrument pour parvenir à ses fins.
Jorg est un sale con. Petits caprices et grandes ambitions. Bref, du haut de ses 14 ans Monsieur a beaucoup de prétention.
Mais on finit par s’habituer au style, au rythme, à l’ambiance, et au personnage principal car le côté dextérien du personnage est plutôt bien rendu : Jorg calcule tout et tout le temps, jouant au Grand Jeu dont il estime être le seul digne d’en sortir vainqueur, et nous livre ses réflexions, ses ambitions, ses anticipations, et parfois ses émotions contradictoires.
Le personnage prend ainsi de la consistance au fur et à mesure des pages et finit par être intéressant.
Pour le reste c’est anecdotique : on retrouve des crevards aristocratiques, des magos mégalos et une tripotée de soudards dont on ne retient même pas les noms (ça c’est généralement un mauvais signe).
Rares sont ceux qui sortent du lot : Nubain, Makin, le Grand Gorgoth, le petit Gog.

Passons maintenant à l’univers :
Au début on se dit que cet univers secondaire aurait mieux fait d’être primaire :
- Rhin, Seine, Loire ; Connaught, Normandie, Orléanais ; Reims, Limoges; Lyon, Hollandais, Teutons, Nippons
- des références aux auteurs grecs et latins (Euclide, Socrate, Platon, Plutarque…)
- des références à la religion chrétienne avec, Jesu Christ, la Vierge-Marie et la papauté romaine…
On se demande pendant longtemps si l’auteur n’aurait pas mieux fait de carrément écrire un roman historique
Dans une démarche à la G.G Kay, on est proche d'une version raccourcie et gritty de l’Enfant de la Toussaint de J.-F. Nahmias
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Mais lentement mais sûrement on glisse dans un autre univers (Shakespeare, Nietzche, toxiques, ADM, IA).
Ce côté-là aurait pu (du ?) être davantage assumé, mais peut-être sera-ce le cas dans les suites !


Passons maintenant à l’intrigue :
L’auteur, les marionnettistes et leurs marionnettes compliquent inutilement les choses… pour permettre à l’intrigue d’aller de l’avant et à Jorg de continuer à sévir en dépit parfois du bon sens le plus élémentaire.
Et on peut avoir l’impression que le twist sur l’univers amené par petites touches est un peu saboté par des apports fantasy légèrement foutraques (les passages nécromantiques sont limites WTF)

Dans les mêmes veines c’est en dessous de Hordes, Hawkmoon, Le Sang des Ambrose et le Baiser du Rasoir.
Si ML voulait faire conter une quête de vengeance dans une ambiance Guerre de Cents ans, c’est raté
Si ML voulait fait de la fantasy à canaille dans une ambiance post-apocalyptique, c’est aussi raté
Mais si ML voulait faire de la Dark Fantasy pour Young Adult, alors là je dis bravo et j’applaudis des 2 mains !

Univers, ambiance, personnages : Jorg avait tout pour être un de ces princes des écorcheurs de la Guerre de Cent Ans dont Froissart nous narrait les horribles méfaits dans ses chroniques.
Mais c’est laborieux sur le fond et sur la forme même si l’ensemble se bonifie agréablement au fil des pages.
Sûr que l’adolescent psychopathe dont on suit les aventures amorales ne va ne pas plaire à tout le monde
Pour un 1er roman, l’auteur propose des partis pris originaux mais leurs exécutions laissent à désirer.
Gageons qu’avec plus de maturité de la part de l’auteur cela va gagner en qualité sur le fond et la forme.
Allons-nous vers un anti-Fitz à la sauce Hawkmoon ? :twisted:

Et pour finir je lance une grande invocation : santino, Santino, SANTINO ! (s'elle lui parvient, elle vous expliquera)

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Modifié en dernier par Albéric le 26 déc. 2012, 19:57, modifié 1 fois.
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tam-tam
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

Message non lu par tam-tam »

Ta belle critique en forme d'obsèques + la couverture avec un assassin à capuche inside + VO = C'est pas pour moi.

Mais quoiqu'il en soit c'est toujours enrichissant de savoir à quels livres il ne faut pas s'attaquer.
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

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Pourtant le cycle est en VF chez Bragelonne ! (ou plutôt 1er tome VF, les tomes 2 et 3 en cours de traduction) :wink:
J'ai mis la couv VO car je la trouve plus proche du personnage principal que la couverture VF.
Une lecture sympathique au final, mais des partis pris clivants et une plume qui visiblement se cherche encore beaucoup.
Pour un 1er roman, l'ensemble est plutôt satisfaisant surtout une fois levée l'hypothèque sur le nature du background.
Je ne vous spoile pas avec la carte du tome 2, mais franchement cela devient d'un coup nettement plus intéressant.

Mais au final, rien de totalement incontournable ni sur le fond ni sur la forme loin s'en faut.
J'espère avoir donné suffisamment d'éléments sur le bouquin pour que vous puisiez visualiser à quoi cela ressemble.
J'avais envie de mettre un coup de projecteur sur un nouvel auteur qui ne cède pas forcément aux facilités.
Modifié en dernier par Albéric le 14 nov. 2012, 15:29, modifié 1 fois.
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tam-tam
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

Message non lu par tam-tam »

Albéric a écrit : J'ai mis la couv VO car je la trouve plus proche du personnage principal que la couverture VO.
Mais c'est les mêmes :lol: :wink:

Ceci dit je vais laisser une chance à cette série et je vais attendre ton avis définitif pour trancher sur le sort de ce cycle.
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

Message non lu par Albéric »

Elle sont tellement proches qu'on se demande pourquoi on a demandé à Victor Manuel Leza Moreno d'en refaire une.
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D'après le traductrice la suite assume nettement plus le côté post-apo : on n'est pas à l'abri d'une bonne surprise ! :wink:
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

Message non lu par Toon »

Les couv' sont très proches de l'ange de la nuit aussi...
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Albéric
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

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C'est du aux guimicks de la fantasy à capuche (qui selon certains n'existe pas) :

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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

Message non lu par Toon »

je partage globalement le point de vue d'Alberic, j'ajouterai juste un résumé type 4ième de couv, et 2 ou 3 divergences/précisions
A treize ans il est le chef d'une bande de hors-la-loi sanguinaires. Il a décidé qu'à quinze ans, il serait roi. L'heure est venue pour le prince Jorg Ancrath de regagner le château qu'il avait quitté sans un regard en arrière, et de s'emparer de ce qui lui revient de droit. Depuis le jour où il fut contraint d'assister au massacre de sa mère et de son frère, il avance porté par sa fureur. Il n'a plus rien à perdre. Mais, de retour à la cour de son père, c'est la traîtrise qui l'accueille. La traîtrise et la magie noire. Or le jeune Jorg ne craint ni les vivants ni les morts. Animé d'une volonté farouche, il va affronter des ennemis dont il n'imagine même pas les pouvoirs. Car tous ceux qui ont pris l'épée doivent périr par l'épée.
comme cité par Albéric, "c’est un page-turner sombre et implacable". C'est Robin Hobb qui le dit et le truc amusant c'est que Jorg est un anti-Fitz. Oui Jorg est un psychopathe qui à vécu un drame dont un gamin de 9 ans ne peut sortir indemne tant moralement que mentalement, qui ne tergiverse pas avant de prendre une décision et qui n'est pas un looser fini.

Ok, c'est vrai que son personnage n'est pas hyper crédible, depuis qu'il a 9 ans il est à la tête d'une bande de soudards tous plus redoutables les uns que les autres. En 4 ans, il a pillé, violé et tué (parfois les 3 en même temps), un nombre invraisemblable de fois, parle 6 langues, en comprends 6 autres, est autant habile à l’arbalète qu'à l'épée et possède une rhétorique à tout épreuve..

Ok et ? n'est-ce pas justement une volonté de se démarquer de la tendance actuelle orienté Dark Fantasy et amha lancée par le trône de fer ?
De même que l'univers dans lequel les personnages évoluent est un contre-pied aux amateurs de dépaysement, on aura vite reconnu l'europe médiévale, sur lesquels l'auteur greffe des personnages plus contemporains comme Shakespeare et Nietsche, après y avoir intégré certains philosophes Grecs !

Le bestiaire est succint mais original: ca pullule de morts-vivants (la route de la liche porte bien son nom) et pour la première fois, depuis AD&D1, de Leucrotta !
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Sauf qu'en fait ils n'ont rien à voir :laugh:


2 choses que j'ai moins aimé:
D'abord, la construction des chapitres: ils s’enchaînent entre époque actuelle et événements survenus 4 ans plus tôt. A la base ce n'est pas pour me déplaire (cf la république des Voleurs) mais la ou ça devient compliqué c'est que les évènements du passé ne sont pas toujours dans l'ordre ! Déchronologue quand tu nous tiens...

Ensuite en mode spoiler
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La "dérive" vers la SF: la découverte d'une IA sous le Castel Rouge qui demande login et mdp, ca tue mes repères de fantasy
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Albéric
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

Message non lu par Albéric »

Mon bon Toon, on se rejoint pas mal sur ce livre. Il m'avait été recommandé par sa traductrice, et j'ai bien envie de connaître la suite des ambitions de Jorg, mais j'attends sagement que Bragelonne nous propose la trilogie en intégrale... ^^
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amos
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

Message non lu par amos »

J'avais au début marqué que je n'étais pas vraiment d'accord avec vous, mais force est de constaté que si en fait, avec un peu de nuance et de miséricorde (un que Jorg ne connait pas vraiment ...).

Certes le personnage n'est pas crédible pour 2 ronds. Et ça je suis d'accord que c'est pourris, merde il aurait pas pu lui donner 5 ans de plus ? (c'est là dessus où je suis tout à fait d'accord avec vous, on n'y croit pas une seconde à cause de ça).

Certes les découpages du début sont pénibles, mais je pense que c'est l'effet recherché. Je préfère ça à des chapitres plus longs où on aurait risqué d'être écoeuré par le personnage principal qui est foutrement malade. Au début du récit c'est un peu comme quand un nouveau chef arrive dans ton entreprise/service, il pisse partout pour montrer qui est le patron, là c'est pareil. Il doit dès le début nous montrer qu'il n'y a pas plus mauvais, méchant, sadique et dingue que lui ... même Petit Riquet fait office de caniche.
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N'oubliez pas qu'il écrit lui même ses mémoires ... il faut prendre ça en compte et ne pas oubliez que Jorg est un menteur notoire, qui nous dis que son récit n'est pas exagérer expres ... bon là je me perds, mais essayez de voir ça du coté "réel"
Alors va pour le découpage court, qui permet de reprendre son souffle sans haut le coeur.

L'IA ... ouais "why not", mais bon ça n'apporte rien à part l'aspect comique (et trop vu) quand Jorg le prend pour un esprit. J'ai trouvé ça moyen, trop facile, même pour un clin d'oeil.

Par contre ce qui m'a vraiment dérangé, c'est le coté BEAUCOUP TROP facile de tout ce que Jorg entreprend. Même si on nous signale (au cas où on était trop con pour s'en rendre compte) qu'il a une chance dingue ... tout reste trop facile.

A part ça (en fait, ça fait quand même pas mal), j'ai passé un moment très agréable (j'aime assez les anti-héros vraiment méchants ... pas des anti-héros à la Hobb) et c'est vrai que c'est un page-turner super efficace, je n'ai pas vu le temps passé.

Albéric tu dis que le "Baiser du rasoir" (ou qqch comme ça) est plus efficace ... ok, c'est le prochain sur ma PL alors :).

PS : en note je lui ai mis 4/5 (quand je mets 4,5 à "Servir Froid" et 4 au T1 de Rigente) pour la qualité du moment passé, plus que pour la qualité du livre.
Albéric
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

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amos a écrit :Albéric tu dis que le "Baiser du rasoir" (ou qqch comme ça) est plus efficace ... ok, c'est le prochain sur ma PL alors :).
Il est plus homogène surtout. Le 2e cycle de l'auteur est beaucoup plus abouti, même s'il reste quelques scories.
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Albéric
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

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Résumé : Le Prince des fous
La Reine Rouge est crainte dans tout l'Empire Brisé.
Lâche, tricheur et séducteur invétéré, son petit-fils le prince Jalan ne figure qu'en dixième position dans la ligne de succession. Tandis que la souveraine façonne la destinée de millions de sujets, Jalan, lui, s'adonne à ses plaisirs coupables. Jusqu'au jour où il croise le chemin de Snorri, un colosse armé d'une hache décidé à venger sa famille. Le voilà entraîné vers le Nord glacé, dans un voyage mortel où il découvrira à ses risques et périls le véritable secret de la Reine Rouge...

Que de chemin parcouru depuis le premier tome de son premier cycle… Ayant été particulièrement mitigé sur ce dernier, je ne m’attendais pas du tout à prendre autant plaisir au premier tome de son deuxième cycle !
Le cycle de L’Empire Brisé passait à la moulinette les codes du roman d’apprentissage dans une ambiance Dark Fantasy et post-apocalyptique de bon aloi à la Hawkmoon de Michael Moorcock, qui en avait décontenancé plus d’un (avec ici un mélange entre références au christianisme et au paganisme germanique/scandinave, et avec ici aussi une inversion des situations, les gentils Vikings se faisant massacrer par les méchants Anglais ^^). Dans la même ambiance, le cycle de La Reine rouge passe à la moulinette les codes du buddy movie et du road movie… ^^


Pourquoi un buddy movie ? ^^
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Jalan Kendeth, 3e fils du 3e fils de la Reine Rouge, est ici un personnage comme l’américain GRR Martin les aime tant, c’est-à-dire arrogant et insouciant, cynique et narcissique, ne pensant qu’aux petits intérêts de sa petite personne…
Snorri ver Snagson, héros viking des Undoreth, est ici un personnage comme l’anglais David Gemmell les aimait tant, c’est-à-dire fort, courageux, loyal envers les siens jusqu’à la mort et dépositaire d’un code moral avec lequel il ne transigera jamais…
On ne peut trouver personnages plus antinomiques, et pourtant ils vont devoir faire front commun et devoir compter l’un sur l’autre durant leur épopée. Et si tout est raconté à la première personne du point de vue de Jalan, au final c’est bien l’histoire de Snorri qu’on nous raconte (ou plutôt que Snorri nous raconte lui-même à travers les yeux et les oreilles de Jalan) : le héros viking veut à tout prix rejoindre le Fort Noir dans le Grand Nord pour sauver les membres de sa famille qui sont encore en vie et se venger de Sven Briserame qui a tué les autres… Sauf que SPOILERS BIATCH !

Pourquoi un road movie ? ^^
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Dans le film de Stanley Kramer realisé en 1958 et intitulé La Chaîne / The Defiant Ones, dans leur fuite vers la liberté Tony Curtis et Sidney Poitier étaient constamment gênés par la chaîne de fer qui les reliait… Ici c’est la même chose, sauf que la chaîne d’acier est remplacée par un puissant sortilège qui oblige Jalan et Snorri à aller de l’avant, vers là où l’auteur veut les voir sévir… Ils vont devoir traverser une bonne partie de l’Europe dans leur quête de la barrière des glaces, pour accomplir le Maître Sortilège de la Sœur Silencieuse et abattre le lieutenant du Roi Mort, en passant par la Plaine du Pô, les Alpes, la vallée du Rhône, Paris, la Picardie, les Ardennes et la Ruhr avant de rejoindre Hambourg et de traverser la Mer Baltique et la Scandinavie…

J’ai passé un excellent moment d’aventures certes, mais aussi d’humour noir avec les vannes 1er degré de Snorri et les vannes 2e degré de Jalan. Leur duo fonctionne à merveille et nous régalent de tirade savoureuses sources d’une foultitude de réjouissantes citations. Et mention spéciale à ce moment où dans les Alpes Snorri se la joue Horatius Coclès au grand dam de Jalan :
A chaque homme sur cette terre
La mort viendra tôt ou tard viendra.
Et il n’est sort plus enviable
Que de tomber devant l’ennemi nombreux,
Pour les cendres de nos ancêtres,
Les temples de nos dieux.
Et le côté queutard de Jalan va lui jouer bien des tours, avec frère Emmer la travestie, avec la veuve Katherine qui va lui ruiner l’entrejambe après qu’il lui ait mis la main au panier, ou avec la reine d’Ancrath qui bien qu’enceinte jusqu’au cou va le vamper pour l’inciter à défier une machine à tuer (ce qui en fait nous permet de revivre à travers les mésaventures de Jalan les événements les plus marquants du Prince écorché ^^).
J’ai aussi bien ri avec le détournement du Magicien d’Oz, dans lequel nos héros suivent les traces laissés par un monstre légendaire dénommé « train » pour découvrir le repère de la Méchante Sorcière du Nord…
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Toutefois à l’image de son premier cycle, il reste encore quelques défauts enquiquinants :
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- la scène qui lance véritablement le récit est particulièrement mal fagotée
Déjà on glisse du présent au passé sans aucune transition, ce qui obligé à relire le passage pour savoir si on est dans le récit ou dans un flashback. Ensuite on reste dans l’expectative concernant la tragédie de l’opéra : massacre gratuit et/ou sacrifices aux forces des ténèbres, règlement de compte politique, dommages collatéraux d’une guerre de l’ombre de vaste envergure ? Et pourquoi le sort s’acharne sur Jalan, puis sur Snorri alors que ni l’un ni l’autre n’en étaient la cible ? L’auteur par un grosse pirouette : la vieille bique avait tout prévu, elle savait qu’il fallait ainsi agir parce qu’elle avait vu l’avenir et qu’elle savait par avance la manière dont tout allait se terminer, Jalan et Snorri allant se débarrasser de son adversaire honni... Prédestination à la con, la béquille de prédilection des scénarii boiteux !
- les effets secondaires du maître sortilège de la Sœur Silencieuse sont mal amenés :
Avec les remarques sibylline de Jalan on reste dans le schwartz durant moult chapitres, et paf d’un coup il nous révèle qu’il est le vaisseau de l’ange Baraquel et que Snorri est le vaisseau de la diablesse Aslaung, fille de Loki et d’une démone-araignée… et qu’ils ne peuvent communiquer avec leur ange/démon gardien qu’à l’aube et au crépuscule... Sans que soit plus exploité que cela malgré le potentiel très Supernatural du truc (ceux qui connaisse la série télé me comprendront)
- l’échiquier géopolitique de cet univers est compétemment nébuleux…
Oui il y a alliance entre le Roi Mort et la Dame Bleue, et entre la Sœur Silencieuse et la Reine Rouge… Sauf qu’onn ne sait rien des personnages, de leurs territoires, de leurs pouvoirs et leurs objectifs, donc difficile de remettre en place le schmilblick. Mais à la limite, c’est de la faute du narrateur vu que Jalan en a rien foutre de la politique ! mdr
- et puis d’autres trucs maladroits aussi…
Je me demande encore pourquoi on a teasé sur un inexistant lien de parenté entre la Sœur Silencieuse et la Sorcière du Nord… Le passage dans le cirque monégasque est sympa malgré les révélations amenées abruptement par le télépathe Docteur Rhizome, suivi d’un scène d’action horrifique avec ce bébé mort-né se transformant en démon Expiré avant de se faire écraser par un(e) éléphant(e) monté(e) par une jolie écuyère… What The Fuck effectivement, mais c’est un des nombreux indices montrant que la triste histoire de Snorri est aussi également un détournement de la légende de Beowulf ! C’est même dommage que c’est aspect n’ait pas été plus creusé…

Tous ces bémols ne m’ont toutefois pas empêché de kiffer le final qui est un détournement horrifique du Treizième guerrier de Michael Crichton pour le livre et de John McTiernan pour le film, où les Expendables / Douze Salopards affrontent pleins de morts-vivants, de monstres et de démons : ouais, c’était bien tout ça cool !!! ^^
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Le roman se suffit à lui-même, mais appel bien évidemment une suite puisque le Destin a remis la Clé de Loki, capable d’ouvrir les portes de l’Enfer et du Paradis, à un héros viking dépressif, voire suicidaire, qui ne souhaite que retrouver ceux et celles qu’il a perdus…
Et une pensée pour la sympathique traductrice Claire Kreutzberger qui avait adoré travaillé sur le premier cycle de l’auteur, mais qui ici a dû se régaler en nous régalant ! blink
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

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est-ce que c'est un cycle dans le même univers que l'empire brisé ? car j'en ferais bien un topic à part.
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

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Toon a écrit :est-ce que c'est un cycle dans le même univers que l'empire brisé ? car j'en ferais bien un topic à part.
affirmatif (et en plus, il y a plein de scènes croisées avec le premier cycle)
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

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La Reine Rouge, tome 2 : La Clé du menteur
À son grand regret, le prince Jalan est retenu par l’hiver loin du Sud et des luxes de son palais. Si son compagnon, le guerrier Snorri, est chez lui dans le Nord, lui-même n’a qu’une envie : déguerpir. Car le Viking est prêt à défier tout l’Enfer pour ramener sa famille à la vie, et la clé de Loki est en sa possession. Or le Roi Mort entend bien s’approprier cette clé du monde d’en bas qui lui a échappé de si peu, afin que ses défunts sujets puissent régner sur terre…

Le cheminement de ce tome 2 est calqué sur celui du tome 1, ce qui nous donne l’histoire d’un aller et d’un retour. Le duo antinomique formé par Snorri le héros viking et Jalan le prince italien, qui attire les emmerdes quand il ne les provoque pas, est ici augmenté de Tuttugu le vieux marin, de Kara la sorcière islandaise et d’Hennan l’orphelin allemand (les interactions entre chaque membre du groupe sont réussies, c’est un premier bon point). Snorri Snagason désormais détenteur de la Clé du Menteur souhaite ouvrir la porte de l’au-delà pour en ramener sa famille assassinée, mais le groupe est poursuivi par les sycophantes des deux camps qui veulent la récupérer pour poursuivre leurs propres objectifs…
Toujours poursuivis par les zombies du Roi Mort, ils doivent aussi échapper aux vikings rouges d’Edris Dean ou aux créatures inhumaines de Kélem le mage-portier. D’où diverses tribulations en Scandinavie, dans les grottes d’Eridruin, dans le repaire de Skilfar, dans la zone d’influence de la terrible Roue d’Osheim (remember la machine de l’asile dans Ravage de René Barjavel) et dans le hall du Roi sous la Montagne avant que nos héros n’accompagnent une migration vers le sud dirigée par le chef troll Gorgoth (cf. L’Empire brisé certes, mais je soupçonne l’auteur d’avoir un jour joué au jdr Runequest !)
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Chassez le naturel, il revient au galop : au et à mesure qu’il se rapproche de sa patrie, Jalan contaminé à l’aller par les valeurs altruistes et héroïques de Snorri redevient peu à peu lui-même sur le chemin du retour, c’est-à-dire un connard lâche, égoïste et queutard… Mais s’il quitte ses compagnons en retournant à Vermillon, c’est pour y retrouver ses amis casés, ses maîtresses mariées, aucune gratitude chez la Reine Rouge et son pire créancier plus vindicatif que jamais !
Cette phase du récit est assez picaresque, notamment avec une hilarante parodie de duel qui tourne au grand n’importe quoi. Pour échapper à Maerus Tell et au Comte Isen, Jalan galope vers Umbertide la capitale économique de l’Empire Brisé pour y accomplir une mission d’ordre pécuniaire (à moins que son grand-oncle Garyus soit assez précog pour l’envoyer sauver ses amis aux mains des sbires de Grand Capitale et de la Bête Immonde). Et là, l’auteur décide de massacrer à la tronçonneuse le Royaume-Uni ultralibéral de Thatcher, Major, Blair et Cameron en nous brossant le portait d’un dystopie dans laquelle les financiers ont pris le pouvoir en remplaçant l’Etat par une place à une Banque Centrale et dans laquelle les débiteurs préfèrent rééchelonner leurs dettes dans un bagne plutôt que d’avoir affaire aux huissiers nécromanciens venant prélever leurs livres de chair règlementaires… et malheur aux insolvables car c’est les camps d’extermination qui les attendent ! (L’auteur a décidément de la suite dans les idées puisqu’il a déjà déversé le feu nucléaire sur le paradis fiscal luxembourgeois dans le premier tome de l’Empire Brisé… ^^)
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Si le tome 1 nous racontait l’histoire de Snorri, Beowulf post-apo, héros sans peuple pour chanter ses exploits, qui veut se venger de Sven Briserame et qui est destiné à affronter son fils mort avant d’être né, enfant transformé en monstre, ce tome 2 nous raconte l’histoire de Jalan, Kwisatz Haderach raté, qui veut se venger d’Edris Dean et qui est destiné à affronter sa sœur morte avant d’être née, messie transformée en antéchrist… La force du duo ne vient finalement pas de leurs différences, mais de leurs ressemblances car à chaque fois qu’il pourrait sacrifier ses compagnons à ses intérêts personnels, le Côté Clair de la Force brille en lui !
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Les flashbacks sont nombreux et entre voyages temporels, trips oniriques, transes shamaniques et explorations de son propre sang, Jalan découvre la vérité sur bien des sujets : la confrontation entre la Dame Bleue aux yeux pairs et la Sœur Silencieuse à l’œil aveugle (ou plutôt comment sa grand-tante est devenue la Sœur Silencieuse), le siège d’Ameroth contre le Fléau de Slov, bras droit du tsar Keljon, les projets génétiques de sa fam, l’assassinat de sa mère et de sa sœur… la mutilation de son grand oncle Garyus, le massacre des rois Gholloth de Vermillon par Kelem le mage-portier… Bref, le Bene Gesserit à pris le pouvoir à Rougemarche pour défendre ce qu’il reste de l’Empire Brisé !
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L’auteur maîtrise ses classiques, et en actionnant ses petites cellules grises on lit facilement entre les lignes :
- on pioche chez JRR Tolkien, car la Clé du Menteur est à peine moins traître que l’anneau unique et Snorri poursuit comme Frodon son chemin de croix, c’est grâce à l’amitié indéfectible de Jalan qui officie ici en tant qu’alter ego de Sam
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- on pioche chez Michael Moorcock, car non seulement l’ensemble fait penser à une version améliorée du Cycle d’Hawkmoon, mais on devine que la Dame Bleu défend la cause des Dieux du Chaos et Kelem celle des Seigneurs de l’Ordre et qu’ils se livrent par l’intermédiaire du Roi Mort et de la Reine Rouge une partie d’échec dantesque (ou plutôt de jeu de go, puisqu’on ne prive pas de retourner les pions adverses contre leur précédent possesseur… ^^) Pour aller jusqu’au bout de l’analogie, ajoutons la sorcière des glaces Skilfar qui en tant que partisane du libre arbitre absolu défend la cause de la Balance… blink
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- on pioche chez David Gemmell vu que le duo Snorri / Jalan est un détournement du duo Druss / Sieben, mais pas seulement vu qu’on retrouve son humanisme populaire et que l’auteur participe à sa croisade contre les homines crevares
- on pioche chez Joe Abercrombie car comme chez lui le grimm & gritty dans lequel baigne tout le roman n’est qu’une Boîte de Pandore destinée à délivrer l’Espoir
- on pioche chez Frank Herbert, et pas qu’un peu : empereur, grandes maisons, féodalité rétrofuturiste, projets eugénistes, explorations génétiques, guerres psychiques entre liseurs d’avenirs…
- on pioche chez Jack Vance la part belle faite au voyage, le côté picaresque parfois totalement assumé et toutes ces contrées et ses peuples baroques voire barrés
- on pioche chez Roger Zelazny avec la Roue d’Osheim, espèce de Marelle artificielle visant à exploiter le chaos originel, mais on retrouve aussi les traces du Dallas Fantasy si cher à l’auteur ainsi que son traditionnel héros désabusé sauveur de l’humanité
- on pioche chez Dan Simmons par de multiples aspects, mais celui qui m’a le plus sauté aux yeux c’est la bataille d’Ameroth où Alica Kendeth massacre les forces du seigneur de guerre Anar Kerwcjz en recourant à la technologie interdite des champs de célérité
Cela donne envie hein ! Après tout n’est parfait car j’ai trouvé l’ange gardien Baraquel et la démone gardienne Aslaug encore trop peu exploités, mais surtout l’auteur n’arrive toujours pas à se dépêtre de son horrible habitude d’expliquer à posteriori les enjeux en cours d’où le recours fréquent à la sérendipité et aux deus ex machina pour envoyer les personnages là où l’auteur veut les voir sévir. Alors oui ici on reprend le puzzle narratif d’Hypérion et l’odyssée d’Endymion, mais on sacrifie au plaisir de compliquer en y ajoutant des intelligences artificielles, des post-humains, les supercordes, des univers parallèles et des ombres dimensionnelles, ainsi que et deux ou trois trucs de physique quantique : les sfistes vont adorer ! blink
Pour compenser, les dialogues pleins de piques et de bons mots sont savoureux (la traductrice Claire Kreutzberger, qui s’occupe de l’auteur depuis son premier roman a dû s’éclater plus que jamais en nous traduisant tout cela !) et on n’oublie pas d’offrir au lecteur un bon paquet de scènes d’action de bonne facture, spécialement quand elles sont horrifiques ( il y a un passage hitchcockien où Jalan est enfermé dans un camp de concentration : tant que les zombies réanimés par le Roi Mort sont de l’autre côté des barreaux, il essaye de jouer la montre, mais avec des compagnons de cellule souffreteux avec déjà un pied dans la tombe, l’urgence devient absolue ; et il y aussi un détournement de la Tour de l’Elephant de R.E. Howard qui devient la Tour du Fraudeur, alter ego de la Bastille où sont enfermés tous les robins des bois opposés au capitalisme et à l’ultralibéralisme…)


Tout homme à un prix, et au bout du chemin Jalan va devoir découvrir le sien avant de faire un choix : est-il prêt à sacrifier son seul et unique ami sur l’autel du Veau d’Or, ou est-il prêt à renoncer à celui qu’il est pour devenir celui qu’il aurait dû être ? Le sort du monde se joue donc dans l’âme d’un seul homme : c’est l’histoire universelle du kama, de l’artha, du dharma et du karma…
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Snorri, l’espoir déçu du peuple des Undoreths, et Jalan, l’espoir déçu de la dynastie des Kendeth, armés de la Clé du Menteur et de la Lance d’Odin, sont désormais la dernière chance de l’Empire Brisé : c’est de l’autre côté qu’ils vont devoir affronter les forces conjointes du Grand Capital et de la Bête Immonde ! Que de chemin parcouru pour Mark Lawrence depuis un premier roman moyen car inégal et inabouti… To Be Continued

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Albéric
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Re: [Cycle] L'Empire Brisé / Mark Lawrence

Message non lu par Albéric »

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résumé tome 3 : La Roue d'Osheim
Les pions sont faits pour être sacrifiés...
Toutes les horreurs de l’Enfer se dressent devant Snorri ver Snagason, décidé à secourir sa famille... si toutefois il est possible de sauver les défunts. Pour sa part, Jalan Kendeth cherche uniquement à sauver sa peau et à s’emparer de la clé du menteur. L’invention de Loki, qui permet d’ouvrir n’importe quelle serrure ou porte, pourrait bien également influer de façon décisive sur le sort de Jalan, une fois celui-ci revenu dans le monde des vivants.
Jalan entend en effet renouer avec sa vie oisive de débauché. Le destin a cependant pour lui des projets d’une tout autre envergure. La Roue d’Osheim tourne toujours plus vite, et à moins que l’on interrompe sa course, le monde se lézardera.
Jalan et Snorri se retrouvent confrontés à maints dangers, de la horde macabre du Roi Mort aux nombreux miroirs de la Dame Bleue... mais la Roue d’Osheim finit toujours par vous happer à un moment ou à un autre. On ne peut que triompher ou périr...

A la fin du tome 2, nous avions laissé Jalan et Snorri arpentant l'enfer pour échapper aux forces obscures de la crevardise... Au début du tome 3, Jalan éjecté de l'enfer par une succube se retrouve la cul en l'air quelque part dans le désert du Sahara...
On reprend les codes de la série racontée à la 1ère personne par Jalan qui se fait une joie d'apporter avec un réjouissant humour noir ses commentaires cyniques et sarcastique sur tout ce qui l'entoure (d'pù la profusion de citations cools et de punchlines culte, mais le buddy movie marche ici moins bien car Jalan officie plus souvent en solo qu'en duio, et l'auteur aficionado de science-fantasy moorcokienne qui a longtemps a marché sur la corde raide séparant la science-fiction de la fantasy est maintenant obligé de démystifier son univers...
On reprend également le principe de l'histoire dans l'histoire, et après la catabase de notre dynamique duo dans laquelle se catapulte l'enfer de Dante de Jalan et l'enfer viking de Snorri, on va au bout l'histoire de Snorri qui est une formidable fable sur le deuil : je crois bien n'avoir rien lu d'aussi bon et d'aussi beau sur le sujet !
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(Snorri, pastiche de Beowoufl, continue de croire dur comme fer qu'il peut arracher les siens aux griffes de l'enfer... Mais au bout du bout le père qui comptait sauver son fils est sauvé par le fils tel qu'il l'avait imaginer une fois devenu adulte : il retrouve sa famille oui, mais cette dernière l'attendait non pour être sauvée mais pour le sauver lui de ses illusions)


Il y a une 1ère partie picaresque :
Jalan doit accompagner une caravane traversant le Sahara, et doit échapper aux zombies et aux démons, comme aux attentions des filles de son hôte et aux lames des fils de son hôte, avant que n'explose un Soleil des Bâtisseurs (voir L'Empire brisé ^^)... Rescapé des sables du désert, il retrouve de vieux amis en les personnes d'un mathémagicien, d'un fils du calife et de ce bon vieux Jorg d'Ancrath qui devient son coach en développement personnel... Ensuite il traverse la Mer du Milieu, et en passant par les îles corsaires coiffe au poteau son vieux pote en libérant Lisa DeVeer avant lui... Il regagne Vermillon et règle ses comptes : pour ne pas redevenir un pion de la Reine Rouge et de la Sœur Silencieuse, il offre la Clé du Menteur au vieux Garys, et par à la rencontre de se débiteurs pour leur faire avaler leur dents (méthode Jorg ^^).
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Il y a une 2e partie 100% zombies !
C'est la lutte finale : la Reine Rouge et la Sœur Silencieuse, qui incarnent à elles deux Elisabeth Ière, chevauchent vers Slov pour affronter la Dame Bleue, qui incarne à elle seule cette sorcière de Margaret Thather et qui se fait une joie de lâcher en retour le Roi Mort et ses troupes mortes-vivantes sur la capitale de Vermillon gardée par la hommes de la famille Kendeth... Je me suis tapé une dizaine de bouquins zombifiques pour retrouver le grand frisson de Word War Z, et c'est ici que l'ai enfin trouvé alors que je ne l'attendais pas !
Face à la horde des non-morts chaque habitant devient un allié en puissance de l'ennemi, et il faut faire dans l'urgence des choix drastiques pour sauver ce qui peut encore l'être... L'auteur met à contribution toute la culture zombie, et j'ai kiffé le gros délire à la fois épique et horrifique avec les nécromanciens, les golems de chair, les créatures à la Resident Evil, les sorciers infiltrés qui multiplient les opérations suicides aux quatres coins du palais... Les frères Kendeth, réunis par le deuil de leur père et la bannière de leur grand-oncle Garyus nommé gouverneur par intérim, se couvrent de gloire avant de devoir affronter l'ennemi intérieur qui les poignarde dans le dos et la Némésis de leur lignée, cette sœur tuée avant d'être née qui a été transformée en véritable antéchrist... On passe si joliment de l'épique à horreur et/ou au burlesque, et de l'horreur et/ou du burlesque à l'épique qu'on j'ai surkiffé de la première à la dernière ligne !
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Il y a une 3e partie road movie :
Jalan retrouve Snorri et tous les deux chevauchent ensemble vers Slov, la Reine Rouge et la Dame Bleue... Il y a encore du picaresque avec le retour dans le récit du Baron Fou, de Kara l'apprentie sorcière et d'Hennan l'orphelin polonais, du Docteur Rhizome coincé dans sa bulle de stase, et l'épisode de la cardinale et du dragon zombie (ah ben voila, après Grendel notre détournement de Beowulf trouve enfin son dragon donc son moment de gloire ! ^^), mais plus on se dirige vers la Roue d'Osheim et plus Jalan est confronté à ses tourments intérieurs qui prennent de John Tranchaille son croquemitaine personnel ici en monde Michael Myers d'Halloween (qui lui permet d'oublier que l'horreur qu'est devenue sa sœur a traversé le voile qui sépare le monde des morts de celui des morts pour le dévorer)... C'est-à-dire pour des affrontements de mages détraqués par imaginations interposées grâce à la Roue d'Osheim, génial invention zelaznienne qui met à contribution toute la philosophie jungienne
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La Roue d'Osheim est un accélérateur de particules de plusieurs centaines de kilomètres de diamètre situé quelque part du côté de Leipiz en Allemagne. Il était au centre du projet IKOL qui devait abolir les frontières entres les différentes réalités pour permettre à l'esprit d'influencer sur la matière. Les apprentis sorciers fous persuadés de leur supériorité pensaient qu'ils allaient tous de devenir des dieux en imposant leur volonté au réel, sauf qu'ils ont oublié que leurs volontés n'étaient ait rien face à celles des milliards d'être humains qui les entourent et qui les ont précédés : ils n'ont pas réussi à transformer la réalité à leur image, c'est l'inconscient collectif de l'humanité qui a redimensionner la réalité à la sienne... C'est ainsi que dieux et monstres sont revenus à la vie, et que démons et merveilles sont apparus dans l'Europe du Tragique millénaire, et que les scientifiques Asha Lauglin, Bareth Kell et Laurence O'Kee sont devenus Alsaug la démone-araignée, l'archange Baraquel et le trikster Loki... Ce mélange entre psychologie jungienne et Science-Fantasy complètement barrée est carrément génial !!!
Et c'est ainsi que les Bâtisseurs participent toujours à la grande marche du monde plaqués derrière leurs champs de stase, réfugiés sous une forme complètement digitalisés dans des paradis numériques, transférés dans des vaisseaux de carbone et de silicone appelés « androïdes », ou qui sont passés de la technologie à la magie pour profiter de la situation comme Mora Shival alias la Dame Bleue... Dame qui veut accélérer la course de la Roue d'Osheim pour réussir là où ses prédécesseurs ont échouer : il suffit de détruire l'humanité, pour que son inconscient collectif n'intervienne plus dans la processus !

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Comme dans tout bon roman épique digne de ce nom, au bout du bout on suit l'aboutissement de la quête du héros aux mille et uns visages... Les Siths proposent à Jalan de devenir dieu dans un autre monde à condition d'abandonner celui qui est le sien au triste sort qui lui est réservé (allégorie de cette saloperie de carriérisme : améliorer son propre sort en abandonnant les autres à leur sort ?). Jalan est une fois de plus soumis à la tentation, plus que jamais même devrait-on dire... Mais en son âme et conscience peut-être trahir tous ses compagnons qui les uns après les autres passent en mode epicness to the max ?
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- Snorri qui a tout perdu est revenu de l'enfer pour lui prêter main forte
- son vieux père qui finalement lui a tout pardonné est mort pour le sauver
- ses frères qui l'ont toujours détesté en leurs derniers instants ont tout fait pour le protéger
- Kara et Hennan libres des leur choix risquent leurs vies pour détruire les miroirs fractals de la Dame Bleue
- la Reine Rouge et la Sœur Silencieuse affrontent la Dame Bleue, alias Dark Sidious au féminin, alias cette sorcière de Margaret Thatcher... Et elles auraient été vaincues à plates coutures sans l'ultime sacrifice de leur frère Garyus, le pépé handicapé mésestimé et méprisé de tous qui combine la magie et la technologie pour offrir à sa famille et à son camp une chance d'emporter la victoire !
« Nous sommes les Kendeth ! Nous luttons. Nous luttons même lorsqu'il n'y a plus d'espoir. Nous résistons tant que le sang coule dans nos veines. »
On a toujours dit à Jalan que l'homme étant un loup pour l'homme il n'y avait pas d'autre alternative que de mépriser et exploiter son prochain. Et on lui a toujours dit que personne n'était sorti vivant de sa confrontation avec la Roue d'Osheim, or il apprend que seuls deux individus y ont survécu :
- la Dame Bleue qui a troqué son humanité contre le pouvoir absolu, donc Jalan a le choix de passer du Côté Obscur de la Force : « tous pour un », c'est-à-dire abandonner l'humanité à son sort et sacrifier un monde entier pour devenir un dieu dans un autre
- le grand-père d'Hennan qui a abandonné le pouvoir absolu pour retrouver son humanité perdue, donc Jalan a le choix de passer du Côté Clair de la Force : « un pour tous », c'est-à-dire abandonner les ambitions personnelles délirantes pour offrir un sursis au monde et partager son sort avec autrui quel qu'en soit le prix
Dans Le Retour du Jedi, nul ne pouvait douter un instant que face à l'Empereur le noble et valeureux Luke Skywalker allait faire le bon choix... Mais Jalan ? Le dandy égoïste voire égotique qui n'a cessé de répéter depuis le tome 1 qu'il ne pensait qu'à sa grande gueule ? Le suspens est à son comble : les hommes ont-ils vraiment la possibilité de devenir meilleurs contrairement à ce tout ce qu'affirment tous les panégyristes ultralibéraux / néoféodaux du « greed is good » ??? (le jour venu ces traîtres à l’humanité seront tous accueillis à bras ouverts en enfer)
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Au au fond de la Boîte de Pandore se trouve toujours l'Espoir : au contact de Snorri il a changé, contaminé par l'héroïsme romantique de son compagnon d'arme... Jamais le Jalan du tome 1 n'aurait réalisé ce qu'accomplit le Jalan du tome 3... Dans le final de chaque tome, il est soumis à la tentation, et à chaque fois on lui promet monts et merveilles en échange de sa collaboration qui consiste à faire taire tout élan de solidarité avec le reste l'humanité... Les intérêts du lâche vont-ils rejoindre eux du héros ? Le sort du monde se joue donc une nouvelle fois dans l’âme et le cœur d'un seul homme donc je ne ferai aucun commentaire sur l'épilogue dont je vous laisse le plaisir de la découverte ! Justice Forever ? ^^
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Je ne suis pas aveugle, donc je ne suis pas dupe des lacunes inhérentes au cycle car si l'auteur sait où il va il nous l'explique souvent trop tard en nous laissant trop longtemps dans le schwartz
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- alors qu'un côté on a la Dame Bleue, le Roi Mort et le mage portier Kélem, la 1ère se servant des deux autres pour parvenir à son propre objectif qui est d'accélérer la course de la Roue d'Osheim pour détruire l’humanité et reconstruire le monde à son image bien à l'abri dans l’œil du cyclone (car le Roi Mort lui fragilise la frontière entre les réalités en faisant revenir les morts à la vie pour lui-même franchir le voile qui sépare le monde des morts du monde des vivants, tandis que Kélem poursuit ses expériences sur les voyages interdimensionnels pour trouver la porte du paradis ou à défaut celle qui lui permettrait d'échapper au merdier mis en place par la Dame Bleue)
- d'un autre côté nous avons la famille Kendeth avec Alica, Garyus et la Sœur Silencieuse qui souhaitent sauver ce qui peut encore l'être à l'aide de la magie et de la technologie... l'idée c'est que Garyus a sacrifié son corps et la Sœur Silencieuse a sacrifié son esprit pour faire d'Alica une wonder woman sans peur et sans reproche seule capable d'affronter la Dame Bleue de femme à femme, mais ce n'est explicité à aucun moment !
- l'événement déclencheur du tome 1 (la catastrophe de l'Opéra) était particulièrement mal fagotée, et jusqu'au bout on ne sait pas si la Soeur Silencieuse liseuse d'avenir a manipulé Jalan, Snorri et leurs amis ou si Jalan est le Facteur X de la Reine Rouge de la même manière qu'Edis Dean est le Facteur X de la Dame Bleue
- pas mal d'interlocuteurs essaient de semer le doute dans l'esprit du lecteur, mais franchement j'ai presque envie de dire que le récit est déjà assez touffu comme cela pour pouvoir s'en passer...
- pas fan que le picaresque prenne autant de place dans le récit
- et qu'est devenue la Lance d'Odin récupérée dans le tome 2 ?


Je pensais que l'auteur avait été au bout de lui-même avec son pamphlet anticrevards dans la plus grande tradition de la fantasty populares incarnée par R.E. Howard, Michael Moorcock et David Gemmell... Homme de peu de foi que j'étais ! Le mec est équipé d'une couillerie en béton armé, et il remet ça avec quatre super-héroïnes badass qui dans un univers entre dark fantasy et post-apo rejouent les rôles jadis dévolues à Athos, Portos, Aramis et d'Artagnan, mais ceci est une autre histoire... Justice Forever ? ^^
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