On ne saura jamais à quoi aurait ressemblé la version de
Guillermo Del Toro, mais on peut en avoir une petite idée sur la question tant certains passages semblent avoir fait par lui pour lui (j’ai même peur que les passages les plus imaginatifs ne doivent lui être crédités). Donc allons-y pour cette prélogie jacksonienne :
The Hobbit, la menace fantôme !
L’année 2012 a été riche en blockbusters ratés, fort heureusement celui-ci n’en fait pas partie.
Très peu d’incohérences mises à part les épées-radars qui fonctionnent selon leur bon vouloir…
Car j’ai encore en mémoire la médiocre réalisation de
Blanche-Neige et le Chasseur dont les scènes de dialogues comportaient plus de plans à la minute que les scènes d’action de
Matrix.
PJ est un bon réalisateur, qui s’est bien s’entourer (à commencer par sa compagne
Fran Walsh)
PJ est un bon réalisateur, qui sait mettre ses acteurs en valeur :
Martin Freeman (
Sherlock) excellent en Bilbo évidemment, et on peut retrouver avec bonheur les acteurs du SdA, certains se montrant même plus à l’aise dans la prélogie que dans la trilogie.
PJ est un bon réalisateur, qui fait coïncider rythme de la réalisation et rythme de la narration !
Allons à l’essentiel, les souffle épique est là : nous voilà de retour dans les Terres du Milieu !
- les paysages de Nouvelle-Zélande sont magnifiques, les touristes vont encore affluer
- la musique est de très grande qualité, merci
Howard Shore
- les visuels sont magnifiques, merci
John Howe et
Alan Lee
- les scènes d’action, même concentrées dans la 2ème moitié, sont nombreuses et variées
- les nombreuses petites mains de WETA ont encore réalisé un travail exceptionnel
- la réalisation est de bon aloi sinon de qualité et assure à ce long film un bon rythme
Le film met du temps à démarrer, mais passé un cap on enchaîne sans temps mort.
Mais finalement le film est dynamique et on ne voit pas du tout défiler les 2h40 !
Reste quand même un paquet de scène dispensables qui aurait plus eut leur place en VL.
Mais bon, fallait bien justifier qu’on fasse 3 films là ou 2 auraient largement suffit…
Ainsi tous les passages consacrés à Radagast le Brun sont de bons gros What The Fuck !
(censément éloigner les Orcs, il semble les rabattre à plusieurs reprises sur la Communauté)
Il y a quantité de petites fautes de goûts, mais rien qui ne vienne vraiment vampiriser le film :
- les gimmicks jacksoniens (morve/vomi, pet/rot, les problèmes d’obésité, les trucs glauquinets)
- les passages jeux vidéos / attractions foraines : Goblinville = Temple Maudit de
Spielberg ?
J’ai aussi noté quelques ratages dans les chorégraphies (coups qui ne portent pas), mais n’oublions que le regretté maître d’armes
Bob Anderson n’est plus aux manettes des combats.
Après même s’il n’y rien de trop fumé, nos 13 nains font un peu ninjas sur les bords…
Bref, peu de choses ont changé en 10 ans : on peut s’en féliciter, mais on peut aussi le regretter.
J’ai vu que certains avait surkiffé le concours d’énigmes, moi j’avais hâte qu’il se termine.
Les grimaces de Gollum on y a déjà eu droit en long en large et en travers dans le SdA de PJ.
(notez qu’Andy Serkis est monté en grade puisqu’il est devenu directeur de la 2ème équipe)
Et un bashage à la
Naheulbeuk vraiment pas fin pour un sou : les elfes musiciens végétariens…
Et, gros point noir trop de CGI tue les CGI !
J’ai trouvé les wargs et les aigles très réussis, même si un peu d’animatronics n’aurait pas été de refus pour les gros plans qui trahissent l’artificialité des visuels.
Je m’attendais au pire avec Azog, mais finalement cela passe très bien et Manu Benett (
Spartacus) apporte une plus-value au personnage qui va servir de fil directeur aux 3 films.
On ne pourra pas en dire autant de Benedict Cumberbatch (
Sherlock) en Nécromancien… lol
Je regrette hautement qu’on l’ait affublé de 2 yeux bleus totalement inexpressifs.
Mais c’est quoi ces gobelins pourris qui ressemblent à rien, ceux du SdA étaient bien mieux !
Quand au Roi Gobelin qui ressemble à Jabba the Hutt c’est juste un gros What The Fuck…
(ou une nouvelle mise en abîme des problèmes de surpoids de PJ complexé par le sujet)
Passons aux problèmes d’adaptation :
J’ai eu du mal à retrouver la magie du livre et plus encore celle de la très bonne adaptation BD.
Les puristes vont râler, et ils ont raison. On s’éloigne encore plus du ton poétique tolkienien.
Ainsi, très réussis ou semi-raté, il y a pas mal de trucs qui font plus fait penser à
Warhammer,
Heroes of Might & Magic voir
Magic the Gathering qu’à l’univers de Tolkien.
Evidemment les gros recyclages de
LoTRO le MMORPG viennent renforcer ce sentiment.
Et qu’on ne vienne pas me dire que la critique est facile car ces derniers ne feraient que s’inspirer de Tolkien, car à ma connaissance Tolkien n’a réalisé ni BD, ni films, ni jeux vidéos.
PJ a voulu faire un film plus grand public : beaucoup de scènes et dialogues un peu too much, des blagues peu utiles tombant parfois à plat et surtout pas une goutte de sang pour les enfants !
La scène des trolls est ainsi carrément gamine et il y quelques passages du même acabit.
Et je n’ai pas été super emballé par le design des nains : trop humains / pas assez tolkieniens…
le nain russe bodybuildé (Dwalin), le nain roumain et sa bizarro-chapka (James Nesbitt méconnaissable en Bofur), le mini Legolas beau-gosse (Kili), le mini Obélix obèse (Bombur)…
Et si Richard Armitage a la grande classe, il fait plus Aragorn bis que prince nain en exil.
Si rien ne vient gâcher le film, pour l’instant la plupart d’entre eux font juste de la figuration.
(on imagine sans peine qu’on leur accordera davantage de temps de parole dans la VL)
Entre le ton léger du livre et le ton épique du SdA, on a carrément le cul entre 2 chaises.
Et on multiplie les références au SdA pour suivre les traces du Starwars de
George Lucas ?
C’est ainsi plus une préquelle au SdA ciné qu’une véritable adaptation au livre de Tolkien.
Dès le départ l’introduction avec Bilbo et Frodon censée faire le lien avec le SdA est trop longue donc dispensable : on vient voir une nouvelle histoire, pas un revival du SdA.
Puis l’impression de déjà vu revient trop souvent dans les musiques (mais il paraît qu’il faut davantage incriminer les choix de PJ que le score d’Howard Shore), dans les situations et les rebondissements, dans des mises en scène calquées sur celle du SdA…
La scène finale est un cas d’école de mise en scène calquée :
Gandalf est acculé avant de murmurer à un papillon avec la même musique que dans le SdA.
Les otaku vont dire que le
SdA de 1954-1955 reprend pas mal d’éléments du
Hobbit de 1937, mais Tolkien n’était ni compositeur, ni directeur de photographie, ni metteur en scène…
On a déjà affaire a une version longue, mais on aurait avoir des séquences qui servent le thème du voyage en le faisant exister en tant que déplacement s'inscrivant dans la durée plutôt que faire du fanservice avec des reprise du SdA : dans la 2ème moitié tout s'enchaîne si vite qu'on a parfois l'impression que la Terre du Milieu est toute petite (on passe de la forêt à la garrigue, puis de la garrigue à la steppe infinie en quelques hectomètres ; la Comté semble voisine de Fondcombe, qui elle-même semble voisine de Goblinville).
Quant aux libertés prises par rapport au bouquin, rien de vraiment gênant, mais j’ai peur qu’on étire l’histoire jute pour faire 3 films parce qu’une trilogie cela fait plus cool qu’un diptyque.
Ainsi plutôt que de se farcir un Radagast WTF et un Conseil Blanc qui tombe comme un cheveu sur la soupe, on aurait pu respecter le matériel d’origine avec Gandalf investiguant à Vertbois pour découvrir un Thrain à l’agonie dans les geôles du Nécromancien à Dol Guldur.
Cela aurait été tellement mieux et j’imagine facilement les manières l’intégrer au scénario.
Les problèmes d’adaptation feront toujours débat mais ce
Voyage Inattendu est très positif !
PJ a maintenu le suspens sur l’apparence de dragon volant cracheur de feu, prenons donc rendez-vous pour le 2ème opus sobrement intitulé
La Désolation de Smaug.